Pour améliorer leur productivité et rester concurrentiels, les employeurs doivent investir de plus en plus en formation. Comment s'y prendre? La Presse vous propose une série d'articles pour découvrir chaque samedi un problème rencontré par une entreprise et comment elle l'a résolu en investissant en formation. Cette semaine, Cuisine Idéale, entreprise de Sherbrooke spécialisée dans la fabrication d'armoires, et son défi de former sa main-d'oeuvre non qualifiée..

La crise économique a amené Cuisine Idéale à réorganiser sa production.

«Nous avons fermé une de nos deux usines et rapatrié toute la production dans l'autre», indique Benoit Gagnon, directeur des ventes chez Cuisine Idéale.

En plus du quart de travail de jour, un de soir et un de nuit ont été créés.

«Une quinzaine d'employés de l'usine fermée sont restés avec nous, mais il a fallu embaucher massivement des gens pas nécessairement qualifiés comme des opérateurs de machines à contrôle numérique, des assembleurs et des peintres», raconte M. Gagnon.

Le manque de formation des travailleurs et la communication déficiente entre les différents quarts de travail et les départements ont rapidement affecté la production.

«Nos employés expérimentés travaillaient de jour et n'étaient pas enchantés à l'idée de former des jeunes de 17 ou 18 ans sur le quart de soir ou de nuit, raconte M. Gagnon. Il fallait trouver une façon de former les nouveaux employés non qualifiés rapidement et d'améliorer la communication.»

Cuisine Idéale a fait confiance à un consultant venu offrir ses services en matière d'amélioration des processus de production.

«Il a ciblé un programme de subventions d'Emploi-Québec pour qualifier la main-d'oeuvre, précise Benoit Gagnon. Par exemple, si nous prenions un employé sans diplôme et que nous le formions pour devenir peintre, nous avions une subvention. Même chose si nous formions un peintre pour qu'il devienne assembleur.»

Pour certains métiers, Emploi-Québec fournissait un manuel de formation. Pour d'autres, spécifiques à son secteur d'activité, Cuisine Idéale à dû en créer.

Par exemple, le consultant a réalisé un manuel avec Johnny Ustinowicz, opérateur expérimenté d'encolleuse de bande de chant numérique chez Cuisine Idéale.

Chaque employé en formation recevait le manuel fraîchement créé, puis passait trois jours avec M. Ustinowicz pour voir comment il faisait fonctionner la machine. Il revenait ensuite deux demi-journées, puis il était autonome. En cas de pépin, il pouvait se référer à son manuel ou poser des questions.

M. Ustinowicz n'a pas hésité à s'investir dans la formation des nouveaux employés.

«Je donne mes trucs pour que la production bloque moins souvent, dit-il. Comme ça, le jour, nous avons moins à compenser les problèmes des quarts de soir et de nuit.»

Une vingtaine d'employés ont profité de l'initiative de formation jusqu'à maintenant.

En même temps, pour améliorer la communication, le consultant a installé un grand tableau dans chaque département.

«Le superviseur y indique environ une fois l'heure où il est rendu, explique Benoit Gagnon. Les superviseurs des autres départements et le directeur de production y trouvent tout ce qu'ils doivent savoir. Ça évite beaucoup de perte de temps.»

L'arrivée des manuels de formation a permis de rendre les employés efficaces et autonomes beaucoup plus rapidement.

«Former un nouvel employé me prenait auparavant entre deux et quatre semaines parce que je devais tout faire verbalement et répéter souvent», explique Johnny Ustinowicz, qui est chez Cuisine Idéale depuis sept ans.

«Pour nous, payer deux employés à travailler sur une même machine pendant quatre jours plutôt que quatre semaines fait une grosse différence», affirme Benoit Gagnon.

La formation intensive s'est déroulée de juin à décembre 2012, mais chaque nouvel employé bénéficie de la nouvelle méthode développée.

«Lorsque nous faisons de l'embauche massive, plusieurs ne traversent pas la période d'essai et il faut recommencer la formation avec d'autres, explique M. Gagnon. Aussi, notre industrie est saisonnière. Nous devons mettre à pied des employés à l'automne et lorsque nous les rappelons le printemps suivant, certains se sont trouvé un autre emploi, puis il faut former de nouveaux employés. Les manuels nous serviront longtemps.»

Les résultats sont aussi au rendez-vous au niveau de la production.

«À l'été 2012, nous avions un taux de rejet et de non-qualité de 16 à 18 % et présentement, il est de 0,8 %, dit fièrement Benoit Gagnon. Les standards de l'industrie sont d'environ 1,2 ou 1,3 %.»

L'usine, qui concentre maintenant ses activités dans le marché de la rénovation et la construction de maisons unifamiliales, a aussi amélioré sa capacité de production.

«L'usine produit en un quart de travail ce qu'elle produisait en trois l'an dernier, affirme M. Gagnon. Il y a maintenant de la place pour la croissance.»