On déplore souvent qu'il y a peu de femmes en politique. Au fédéral, elles représentent le quart des députés. C'est peu, mais c'est un record. En guise d'explication, on cite souvent la difficile conciliation travail-famille-vie personnelle. En ce lendemain de la Journée internationale de la femme, Rosane Doré Lefebvre, élue sous la bannière du Nouveau Parti démocratique (NPD) en 2011, s'est confiée.

Quand on est député, les jours à la Chambre des communes sont longs. Ils commencent souvent vers 7h. Les votes sur les projets de loi ont lieu vers 18h30 et les activités de soirs et de fins de semaine sont nombreuses. Malgré son agenda bien rempli, Rosane Doré Lefebvre se dit privilégiée de vivre cette expérience. Enceinte de 34 semaines, elle réussit même à se dégager certaines soirées. Elle affirme avoir beaucoup de soutien au Parlement. Plusieurs de ses collègues députés lui ont même offert leurs services de gardiennage!

«Je ne sais pas s'ils le savent, mais je me suis fait une liste!», confie-t-elle en entrevue téléphonique accordée du parlement d'Ottawa.

La femme de 28 ans remarque que le soutien vient de tous, peu importe l'appartenance politique. «Chacun y va de ses conseils ou offre de me remplacer à certains engagements, affirme-t-elle. Une femme enceinte au Parlement, c'est plutôt rare!»

Congé parental écourté

Elle fait aussi réagir dans sa circonscription d'Alfred-Pellan à Laval où elle habite les fins de semaine et lorsque la Chambre fait relâche.

«Les gens adorent voir leur députée enceinte. En même temps, ils me demandent si je prendrai un an de congé parental! Je verrai comment l'accouchement se passera, mais je crois que je reviendrai après deux ou trois semaines parce que je dois représenter mon monde et voter sur les projets de loi.»

Elle a la chance d'avoir un conjoint qui travaille avec elle à Ottawa pour le NPD.

«Il ne travaillera probablement pas pendant un an pour m'accompagner entre Ottawa et Laval où nous venons d'acheter une maison.»

A-t-elle peur de se faire expulser de la Chambre des communes si elle y met les pieds avec son bébé comme ce fut le cas l'an dernier pour sa collègue Sana Hassainia, députée de Verchères-LesPatriotes?

«Non. J'étais présente en Chambre à ce moment-là et il y avait eu de la confusion. Un parent a le droit d'entrer en Chambre avec son enfant pour voter.»

Plan de carrière bousculé

Comme plusieurs candidats du NPD lors des dernières élections fédérales, Rosane Doré Lefebvre ne pensait pas être élue.

«On était en décembre, je venais de terminer mon baccalauréat en science politique et géographie à l'Université de Montréal. On m'a offert de devenir candidate. Je voulais entrer à la maîtrise en gestion de l'environnement en septembre, mais j'avais le temps de faire campagne pendant ces mois libres. Dans ma circonscription, les intentions de vote du NPD étaient à 12 ou 13%. Je me suis dit qu'en faisant du porte-à-porte chaque jour, j'allais peut-être faire augmenter le vote de 3 ou 4%. Toutefois, rapidement sur le terrain, j'ai senti que le NPD avait convaincu les gens.»

Rosane Doré Lefebvre a elle-même été séduite lors d'une conférence en 2007 à l'Université de Montréal par le chef actuel Thomas Mulcair et Jack Layton, ex-chef du NPD emporté par le cancer quelques mois après les élections de 2011.

Coup de foudre

«Nous étions quelques étudiants à sortir pour boire une bière après la conférence. Même s'il nous avait déjà tous gagnés par ses idées, Jack est venu avec nous. Ça a été le coup de foudre.»

Maintenant porte-parole adjointe en matière de Sécurité publique au cabinet fantôme, Rosane Doré Lefebvre veut poursuivre son chemin en politique.

«C'est certain que je souhaite me représenter, précise-t-elle. Les premiers mois ont été difficiles et j'ai connu quelques crises d'angoisse parce que nous étions 58députés élus. Les responsabilités étaient importantes et la pression était très forte, mais nous avons été bien entourés.»

Aujourd'hui, elle affirme avoir bien apprivoisé son rôle de députée.

«Je trouve ça vraiment trippant. C'est toute une expérience dans une vie. J'étais passionnée de politique, je pensais peut-être devenir journaliste ou attachée de presse, mais pas députée. J'étais très gênée de parler devant une foule. Au début, poser des questions en Chambre était une torture totale. Heureusement, nous avons reçu de l'aide, des formations et nous en recevons encore.»

Elle poursuit donc son apprentissage des rouages de la politique fédérale. Bientôt, elle devra aussi ajouter les défis d'une nouvelle maman. Le téléphone de certains députés sonnera peut-être pour les inviter à donner suite à leur offre de gardiennage!