Que fait un boutefeu? À quoi ressemble le quotidien d'un animalier ou d'un détective privé? Pour le savoir, La Presse les a rencontrés pour vous. Regard sur des métiers inusités, rares ou méconnus.

Votre dernier courriel a-t-il une valeur historique? C'est une des choses que Nathalie Denis doit déterminer au quotidien. L'archiviste de l'Université de Montréal fouille le présent afin d'écrire l'histoire de demain.

Passionnée de l'information, Nathalie Denis est tombée amoureuse de son domaine dès le premier cours de sa maîtrise en sciences de l'information avec option en archivistique. «Je suis fascinée par les problèmes de la conservation, maintenant que les documents se fixent sur du numérique, avec des formats de fichiers et des supports de conservation qui évoluent constamment et, pire, qui sont éphémères», explique-t-elle.

Travail méconnu

Après deux ans comme archiviste contractuelle, elle a fait son entrée à l'Université de Montréal en 2003. Et elle se sent investie d'une mission, celle de «faire sa part dans la constitution de la mémoire de l'humanité». Rien de moins!

Le travail de l'archiviste est bien plus complexe qu'il n'y paraît. «Mon métier n'est pas de classer des feuilles de papier dans des chemises», précise Nathalie Denis.

Son rôle est plutôt d'aider les employés de l'université à gérer leurs documents. Courriels, budgets, plans de cours et autres documents administratifs sont scrutés à la loupe pour déterminer s'ils seront conservés - et si oui, combien de temps.

«Le volume d'information à traiter est phénoménal. Je fournis aux gens les outils nécessaires pour qu'ils puissent classer leurs documents, les repérer et en disposer correctement.»

Près de 300 règles d'archivage sont disponibles pour les employés. Par exemple, un dossier d'étudiant est conservé durant 75 ans.

Seulement 5% des documents deviennent des archives historiques, et le reste est détruit. Malgré tout, l'Université de Montréal a réussi à accumuler 37 000 boîtes d'archives.

Évolution

Les nouvelles technologies ont considérablement modifié le travail d'archiviste. Les outils sont différents, tout comme le format des documents et leur quantité. Selon Nathalie Denis, c'est d'ailleurs le plus grand défi de son métier.

«On est loin du temps où l'on rédigeait un document à la main et où on le classait à un seul endroit. Aujourd'hui, les textes se retrouvent jusque sur les téléphones cellulaires et dans des formats informatiques qui ont une courte durée de vie.»

Chasse au trésor et petites victoires

Contrairement à d'autres archivistes, Nathalie Denis travaille surtout avec des documents récents. Son emploi du temps est variable: elle s'occupe parfois de la préparation de formations, elle répond aux questions des employés et supervise le travail des techniciens. Elle nettoie aussi les archives.

«C'est parfois difficile pour moi d'être confrontée aux mêmes documents: des factures, des reçus, de la comptabilité... Quand je mets la main sur des documents précieux, comme ceux de la première collation des grades, j'ai l'impression d'être une chasseuse de trésors!»

«J'ai une grande satisfaction lorsque j'ai réellement l'impression d'avoir aidé quelqu'un. C'est une petite brique dans la construction, ça n'a rien à voir avec un coup d'éclat, mais je sais que j'ai rendu le quotidien d'une personne plus facile dans ces cas-là», ajoute-t-elle. Une petite victoire qui lui fait chaud au coeur.

Elle se souvient aussi avec émotion du moment où elle a découvert le fonds d'archives Louis Hémon. «Son roman Maria Chapdelaine est l'un de mes préférés, et ce sont les premiers documents d'archives que j'ai manipulés, il y a 12 ans.»

Avec une telle gardienne de sa mémoire, l'Université de Montréal peut dormir tranquille: ses documents sont à l'abri.