À la fin du mois de décembre, plusieurs travailleurs doivent redoubler d'ardeur pour atteindre les objectifs de l'entreprise. Certains accumulent les frustrations et les insatisfactions à l'égard de l'entreprise ou envers un patron peu réceptif. L'ajout d'une nouvelle tâche est parfois l'étincelle qui incite un employé à remettre spontanément sa démission. Est-ce vraiment le bon geste à faire en cette période de ralentissement économique?

Trois spécialistes en gestion de carrière estiment qu'un recul est parfois nécessaire. «Il faut réfléchir aux raisons qui m'emmènent à vouloir démissionner. Est-ce que j'ai évalué toutes les solutions possibles avec le patron? Partir est-elle vraiment la seule issue?», demande Danielle Labre, associée principale et coach depuis 30 ans au cabinet Vézina Nadeau.

Une discussion franche et honnête avec son supérieur entraîne parfois un dénouement positif. Alain Samson, auteur du livre Dois-je démissionner?, raconte une anecdote à propos d'un employé à bout de souffle qui travaillait pour une caisse populaire.

«Il a dit à sa directrice générale qu'il s'en allait parce qu'il était tanné de la bureaucratie. Sa patronne a alors engagé un employé supplémentaire et il a continué à faire ce qu'il aimait le plus, soit le contact avec le client.»

Une bonne préparation

De son côté, la coach Danielle Labre est d'avis qu'il faut continuer de faire de son mieux à son travail. En dehors des heures, il faut amorcer sa recherche d'emploi et activer son réseau de contacts. «Il faut se poser la question si je pars, est-ce que j'améliore mon sort ou je vais le rendre pire?»

L'auteur Alain Samson utilise l'expression «végéter positivement» à son emploi actuel. «On peut se donner un délai de deux ans. D'ici là, on se sent en contrôle de sa destinée. On fait des gestes pour trouver un emploi qui convient à son talent et à ses passions.»

Pour sa part, le coach Michel Lavoie note l'importance d'entreprendre une démarche de réseautage très poussée.

Expérience vécue

En 1997, M. Lavoie a perdu son emploi de producteur à la télévision de Radio-Canada en raison des compressions budgétaires. «Il faut toujours avoir un plan B, observe-t-il. J'avais suivi des cours en psychologie et j'aime aider les gens. Je me suis lancé dans le coaching. La perte de mon emploi est la meilleure chose qui me soit arrivée.»

Survivre à l'insécurité financière

L'élément crucial dans notre réflexion avant de quitter un emploi confortable est notre seuil de tolérance à l'insécurité financière.

La spécialiste en gestion de carrière Danielle Labre estime qu'à 30 ou 35 ans, les changements se font plus facilement. «Au début de notre carrière, on essaie de se positionner. Cela devient plus dramatique si on avance en âge. Dans la quarantaine, on doit faire face à des enjeux d'ordre économique et familial.»

Le coach Michel Lavoie ajoute qu'une transition de carrière doit se préparer surtout si on une famille et une hypothèque à payer. «Il faut se donner un plan d'un an. Certains pigent dans leur REER, d'autres vendent leur voiture. Il faut énormément de courage.»

Après 45 ans, certains sont réfractaires au changement avec un grand C. «Une personne préfère garder son travail et son patron insupportable en raison de la sécurité financière. Il faut respecter ce choix-là.»

Toutefois, un des clients de Michel Lavoie a surmonté ce cap de l'insécurité financière. «Ses amis le trouvent fou. Il prévoit quitter un travail très payant et une grosse caisse de retraite. Il n'est pas heureux, il a l'impression d'avoir fait le tour du jardin.»

Avant de partir...

Avant de quitter sa sécurité d'emploi, il faut se poser les bonnes questions, disent les experts en gestion de carrière. «Quand on est à bout de souffle, cela est un symptôme. On doit se demander si on peut agir autrement», dit Danielle Labre, coach au cabinet Vézina et Nadeau. L'important, c'est de réaliser si on est encore heureux dans son travail. Parfois la réflexion entraîne des réponses, dont un réaménagement possible de l'horaire. Un compromis avec son employeur est peut-être envisageable. «Les gens ont souvent une part des responsabilités. Ils ne délèguent pas assez ou sont hyper performants. Ils font un travail de qualité, mais à quel prix?», note Mme Labre.