Le président fondateur d'une PME meurt subitement. Il n'a pas de plan de relève et aucun de ses successeurs n'a l'intérêt et les compétences pour reprendre l'entreprise. Dans ce cas vécu, une des filles du défunt a appelé en renfort un gestionnaire spécialisé dans l'intérim pour maintenir les opérations et la valeur de l'entreprise pendant qu'on trouvait un acheteur.

Plusieurs autres circonstances peuvent amener des organisations à faire appel à des gestionnaires spécialisés dans l'intérim, comme une maladie.

«Nous pouvons aussi intervenir dans des circonstances plus positives, comme un gestionnaire qui prend un congé parental, ou une entreprise en croissance fulgurante qui a besoin d'un gestionnaire expérimenté pour une période ponctuelle», affirme Patrick Demars, dirigeant par intérim chez InterExec, auparavant associé du Groupe Osborne.

Gilbert (nom fictif) est pour sa part souvent appelé à faire des interventions dans différents établissements du réseau de la santé qui traversent des périodes difficiles.

«On voit souvent par exemple des problèmes de nature financière, comme des établissements qui accumulent déficit sur déficit. Il y a souvent aussi une distorsion entre les valeurs exprimées par l'organisation et la réalité. Ou encore, des plaintes de mauvais traitements», explique-t-il.

Des gens de l'extérieur

En quoi une personne extérieure à une organisation est-elle mieux placée que les gens à l'interne pour régler un problème?

«Souvent, les gens vont essayer de régler le problème à l'interne avant de faire appel à nous, affirme Gilbert. Mais parfois, ils n'y arrivent pas, ou encore, les gens en place ne sont pas conscients du problème, ou ils ne veulent pas le voir. Il arrive donc que cela nécessite une intervention extérieure. Parfois c'est imposé par une mise sous tutelle, parfois c'est volontaire.»

«L'avantage de faire appel à quelqu'un de l'extérieur, c'est que cette personne n'arrive pas avec tout un historique dans l'organisation. Sans être neutre, une personne de l'extérieur n'a pas le même biais qu'une de l'intérieur», affirme Isabelle Mahy, professeure spécialisée en gestion du changement et en transformation organisationnelle à l'UQAM.

Dans bien des entreprises, le gestionnaire de confiance, compétent, expérimenté et prêt à prendre la relève au pied levé n'existe tout simplement pas.

«C'est fréquent surtout dans les PME, affirme Patrick Demars. C'est pour ça que nous y sommes particulièrement actifs.»

Les dirigeants peuvent aussi simplement avoir besoin d'un avis extérieur.

«Parfois, les dirigeants n'ont pas assez de recul sur leur entreprise, donc ils ont de la difficulté à mettre le doigt sur le bobo. Ils font alors appel à nous et nous travaillons avec les gens en place pour développer des stratégies et les mettre en place pour améliorer la situation», explique M. Demars qui a été gestionnaire pendant 27 ans dans un groupe international dans le secteur des matériaux de construction.

Bien sûr, n'importe quel gestionnaire intérimaire ne peut effectuer n'importe quel mandat. Gilbert par exemple oeuvre dans le réseau de la santé puisqu'il y a mené une longue carrière de gestionnaire.

Chez InterExec, tous les gestionnaires ont un minimum de 25 ans d'expérience en management, dont au moins huit dans un poste de direction. «Et personne n'accepte un intérim sans avoir occupé ce genre de poste dans sa carrière», précise M. Demars.

Quoi faire?

Il semble que l'une des premières choses qu'un gestionnaire intérimaire doive faire lorsqu'il arrive dans un nouvel établissement, c'est d'écouter.

«Il faut rencontrer les employés des différents quarts de travail et des différents secteurs, il faut rencontrer la clientèle et les différentes instances, il faut se présenter, dire ce qu'on viendra faire et ensuite, il faut se mettre en mode écoute», affirme Gilbert.

Pour Isabelle Mahy, un bon gestionnaire intérimaire doit être capable de lire la complexité de la réalité organisationnelle.

«Il faut regarder toutes les dimensions d'un problème et il y a des choses qui ne sont pas visibles au premier regard», précise-t-elle.

«Une fois qu'on a fait un diagnostic d'organisation, il faut établir un plan d'action et le mettre en place avec des objectifs précis à atteindre, affirme Gilbert. Il faut aussi penser à développer des stratégies pour que le relais se fasse lorsqu'on quittera l'organisation.»

«Et surtout, il ne faut pas arriver avec un plan tout fait d'avance, affirme Patrick Demars, parce que c'est une recette pour l'échec!»