Pour plusieurs, l'équité salariale est un dossier réglé. Or, les spécialistes de la question affirment que dans bien des entreprises, rien n'a encore été fait.

Si elles risquent de le payer cher, vous mesdames, vous pourriez recevoir tout un chèque! «Il n'est pas question de doubler des salaires, mais comme l'augmentation est rétroactive à 2001, il peut y avoir de grosses sommes en jeu», affirme Florent Francoeur, président-directeur général de l'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (CRHA).

Il estime qu'environ la moitié des entreprises n'ont pas encore réalisé l'équité salariale.

«Elles doivent s'y mettre parce qu'en plus de devoir appliquer l'équité rétroactivement à 2001, dès le 31 décembre 2010, des amendes seront prévues pour les entreprises délinquantes. Ça pourrait devenir dangereux pour certaines entreprises qui continueraient à ne pas s'occuper de l'équité salariale», précise M. Francoeur.

«Beaucoup d'organismes ont dénoncé le fait que le gouvernement n'avait pas fait suffisamment de pression pour forcer les entreprises à faire l'exercice, ou encore, qu'il n'y avait pas de conséquences. Pourtant, peu d'entreprises oseraient aller à l'encontre d'autres lois équivalentes, comme les normes du travail», remarque M. Francoeur.

Aller chercher des outils

Bien sûr, réaliser l'équité salariale demande un certain effort pour les dirigeants d'entreprise.

«Lorsqu'on lit la loi, ça peut sembler rébarbatif, mais la moitié des entreprises sont passées au travers, alors c'est faisable, ajoute le président de l'Ordre des CRHA. Un paquet d'outils ont été créés pour les entreprises de différentes tailles et ils sont disponibles sur le site de la Commission de l'équité salariale. Nous en proposons aussi sur le site de l'Ordre.»

Plusieurs entreprises préfèrent toutefois confier ce dossier à un expert. C'est ce qu'on a fait entre autres chez EZEM Canada, société pharmaceutique.

«Ça demande une évaluation rigoureuse des postes, ça mobilise des ressources et ça demande des connaissances pointues. Moi, je suis un généraliste, alors pour m'éclairer, je suis allé chercher un consultant spécialisé dans le domaine de la rémunération», explique Yvon Leduc, CRHA, directeur principal, ressources humaines, chez EZEM Canada.

C'est Paul Tremblay, CRHA, directeur rémunération, service-conseil, chez Drakkar Ressources humaines, qui a relevé le défi.

«L'évaluation des postes est une tâche complexe à laquelle il faut porter une grande attention. Ce n'est pas tout de concevoir des questionnaires. Encore faut-il qu'ils mesurent ce qu'ils doivent mesurer sans mélanger les choses. Beaucoup d'entreprises ne se rendent pas compte de l'ampleur du travail à faire. C'est un gros enjeu, d'autant plus que lorsqu'il est question de salaire, la marge d'erreur n'est pas grosse.»

Des avantages

Les experts consultés affirment toutefois que les entreprises ont tout intérêt à entreprendre sans plus tarder le processus.

«Ça permet aux entreprises d'évaluer l'emploi poste par poste de façon structurée et ensuite, de gérer les salaires plus facilement», affirme Paul Tremblay.

Il donne l'exemple d'un emploi évalué à 45 000$ pour lequel un candidat potentiel demande 65 000$. «C'est beaucoup plus facile pour une entreprise de prendre la décision puisqu'elle peut regarder si la demande est cohérente avec sa politique d'équité salariale et si elle aurait la capacité de payer ce salaire pour tous les travailleurs de cette catégorie d'emploi», ajoute M. Tremblay.

Chez EZEM Canada, qui s'est conformé à la loi peu de temps après son entrée en vigueur, le processus a permis également de revoir tout le système de rémunération.

«On a regardé différents scénarios, ce qu'on a le droit de faire dans certaines situations et ce qu'on n'a pas le droit de faire. Ce sont des choses importantes à savoir», indique Yvon Leduc.

Il y a aussi une question de culture d'entreprise. «Bien sûr, l'équité salariale fait légèrement augmenter la masse salariale. On parle généralement de 1% à 4%. Mais les dirigeants pour qui la culture d'entreprise est importante peuvent dire par la suite que, dans leur boîte, les hommes et les femmes qui font un travail équivalent reçoivent un salaire équivalent. Ce n'est pas rien», affirme Florent Francoeur.

Pour plus d'information: www.ces.gouv.qc.cawww.portailrh.org/equite