Ils rêvent de faire une différence dans le monde. Pour eux, un métier ordinaire ne suffit pas: il faut que leur travail aide les autres ou fasse avancer une cause. Mais entre le rêve et la carrière se dressent bien des obstacles. Être idéaliste ne suffit pas: il faut de la détermination.

Catherine Côté rêve de travailler pour Fédération internationale de la Croix-Rouge afin d'aller au secours des sinistrés quand surviennent des catastrophes naturelles. Mais son rêve n'est pas facile à réaliser, car la Croix-Rouge, comme les autres grands organismes internationaux, demande plusieurs années d'expérience avant d'être embauché pour aller sur le terrain.

«J'ai regardé la Croix-Rouge, mais aussi Oxfam, Care Canada, Save the Children, dit-elle. À chaque fois qu'un poste ouvre, il est rapidement comblé. C'est un milieu très compétitif où il est difficile d'entrer. On demande souvent cinq ans d'expérience.»

Alors qu'elle termine sa maîtrise en relations internationales, elle vient de compléter un mandat comme agente de projet pour Katimavik. Son expérience en contact direct avec les jeunes lui a confirmé qu'elle préférait travailler sur le terrain avec les gens plutôt qu'enfermée dans un bureau.

«Ce contact m'a permis de sentir que je faisais une petite différence pour eux, dit-elle. L'idée, ce n'est pas de changer le monde, mais de faire une différence auprès de quelques personnes qui vont repartir et agir positivement dans leur milieu. C'est devenu important pour moi, et je trouve plus motivant de travailler dans ce contexte-là.»

Passer à l'action 

Comment se tailler une place dans le milieu alors que le nombre de places est limité, et que de plus en plus de candidats sont prêts à faire le grand saut?

Thérèse Bouchard, qui a été coopérante pendant quarante ans et est aujourd'hui chargée de cours au certificat en coopération internationale de l'Université de Montréal, a une réponse pour ces jeunes qui rêvent de partir:

«Je leur dis toujours qu'ils ne pourront pas faire ailleurs ce qu'ils ne sont pas capables de faire ici, dit-elle. Qu'ils commencent donc par s'engager comme citoyens ici, à travailler dans de petits organismes de justice sociale ou des groupes communautaires! Et à leur place, j'irais vers des groupes dont l'objectif n'est pas seulement d'aider, mais aussi de transformer le milieu et de changer les mentalités.»

Il faut aussi, dans certains cas, être prêt à faire du bénévolat pendant quelques années avant d'obtenir un emploi payé. «C'est normal que l'on demande de l'expérience, dit l'enseignante. Les pays en voie de développement sont devenus plus développés qu'on le pense. C'est insultant pour eux de voir arriver un responsable de projet qui a moins d'expérience qu'eux et connaît moins le pays. C'est une question de respect.»

Faut-il être idéaliste pour se lancer dans une telle carrière? «Au départ, je dirais qu'il faut avoir un sens aigu de la justice, et des valeurs très humanistes, dit-elle. Quand je suis partie en 1969, j'ai quitté un emploi d'enseignante pour aller travailler bénévolement et j'ai vidé mon compte de banque. Mais aujourd'hui, les motivations pour partir sont devenues beaucoup plus variées qu'elles l'étaient il y a quarante ans. Il y a des carriéristes dans ce domaine comme il y en a ailleurs.»

Il faut aussi faire la distinction entre l'aide humanitaire, qui consiste à agir dans un pays en cas de crise ou d'urgence, par exemple lors du tremblement de terre en Haïti, et la coopération, qui implique un engagement à long terme de la part d'un organisme. Mme Bouchard distingue trois grandes catégories d'employeurs dans le domaine de la coopération internationale.

«D'abord, il y a la fonction publique, dans des organismes comme l'ACDI, la Banque mondiale ou dans l'une des branches des Nations Unies, dit-elle. C'est là que sont les meilleurs salaires et les meilleures conditions de travail. Ensuite, il y a les grandes ONG professionnelles comme Oxfam, le CECI, Développement et Paix.»

Finalement, il y a les plus petites ONG, qui travaillent sur des projets à plus petite échelle. Elles emploient davantage de bénévoles et leurs employés permanents ont des salaires moins élevés que dans les grandes organisations.

«En coopération, il y a un aspect d'idéal qui fait qu'on ne travaille pas pour l'argent, car on n'est pas forcément rémunérés à la hauteur de nos compétences, dit Bruno Ronfard, responsable du certificat en coopération internationale à l'Université de Montréal. Si on veut faire fortune, il ne faut pas choisir ce métier.»