Pendant le processus d'embauche, il arrive couramment que l'employeur recueille des renseignements personnels sur les candidats, afin de s'assurer que ces derniers possèdent les aptitudes ou les qualités requises pour occuper le poste à pourvoir. Qu'advient-il, cependant, si l'employeur découvre, après avoir embauché le candidat, que sa recrue a fait une fausse déclaration en réponse à une question posée en entrevue ou dans un formulaire d'emploi?

D'entrée de jeu, il faut mentionner que l'employeur a le droit d'obtenir des renseignements sur les candidats dans le cadre du processus d'embauche. Ce droit n'est toutefois pas absolu. D'abord, l'employeur ne doit recueillir que les renseignements qui lui permettront de déterminer si le candidat a la capacité d'occuper le poste qu'il postule. Ensuite, l'employeur ne peut requérir du candidat des renseignements portant sur les motifs illicites de discrimination prévus par l'article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne, c'est-à-dire concernant «la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l'utilisation d'un moyen pour pallier ce handicap», à moins que ces informations ne servent à établir si le candidat possède les aptitudes ou les qualités nécessaires pour exécuter les tâches du poste (art. 20). L'article 18.2 de la Charte prévoit aussi que l'employeur ne peut «refuser d'embaucher (...) une personne du seul fait qu'elle a été déclarée coupable d'une infraction pénale ou criminelle, si cette infraction n'a aucun lien avec l'emploi ou si cette personne en a obtenu le pardon».

 

Quant aux conséquences qu'entraînent les fausses déclarations faites par le candidat, qui sont découvertes une fois que celui-ci est embauché, il est important de noter que le congédiement n'est pas nécessairement la sanction appropriée. Deux fondements s'offrent à l'employeur pour sanctionner l'employé en pareilles circonstances.

L'employeur peut, d'une part, appuyer sa décision sur le fait que l'employé, en faisant une fausse déclaration, a contrevenu à son obligation d'honnêteté et de loyauté, ce qui a eu un impact sur le lien de confiance avec l'employeur, lien nécessaire à la continuité de la relation d'emploi. Dans ce dernier cas, les tribunaux ont établi certains critères dans le but de déterminer si le congédiement est justifié, dont les principaux sont: (1) la relation entre la fausse déclaration et les fonctions exercées par l'employé; (2) le fait que l'employeur n'aurait pas embauché l'employé s'il avait connu la vérité; (3) le caractère volontaire de la fausse déclaration. Il faut mentionner que la présence d'un seul de ces facteurs peut parfois suffire à justifier le congédiement.

En somme, force est de conclure que la fausse déclaration faite par un employé au moment du processus d'embauche ne peut justifier automatiquement son congédiement. Cette sanction devra être appréciée à la lumière de certains critères déterminés par les tribunaux. Or, malgré ces balises établies par la jurisprudence, il faut toujours s'en remettre à la règle voulant que chaque cas soit un cas d'espèce et qu'en conséquence, toute situation devra être évaluée selon les circonstances qui lui sont propres.

Me Philippe Levac, CRIA, est avocat au sein du Groupe de l'emploi et du travail chez Ogilvy Renault.