Environ 10% des employés canadiens travaillent, partiellement ou totalement, à partir de leur domicile. Les entreprises et les employés qui optent pour le télétravail bénéficient de plusieurs avantages, dont une plus grande flexibilité des horaires de travail et la réduction des coûts et des pertes de temps liés au transport. Cependant, le télétravail comporte également des défis de taille relatifs notamment à la sécurité informatique, à la gestion des employés et à la gestion de la santé et de la sécurité du travail.

Un employé qui se blesse alors qu'il travaille à domicile peut-il bénéficier des avantages du régime d'indemnisation de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST)? L'employeur a-t-il les mêmes obligations en matière de santé et de sécurité à l'égard d'un employé en télétravail?

 

De façon générale, l'employeur et l'employé ont des obligations et des droits similaires à ceux qui existent dans le cas du travailleur qui exerce ses fonctions dans l'entreprise. À titre d'exemple, en matière de prévention, le télétravailleur doit prendre les mesures nécessaires pour protéger sa santé et sa sécurité et doit participer à l'identification et à l'élimination des risques d'accident. En cas d'accident, le télétravailleur, tout comme les autres travailleurs, doit en aviser son employeur le plus rapidement possible. L'employeur, quant à lui, doit notamment s'assurer que le poste de travail de l'employé est sécuritaire, fournir dans certains cas l'équipement approprié et informer le travailleur des risques liés à son travail. À cet effet, l'employeur peut donner des ateliers de formation sur la posture au travail ou l'entretien des lieux de travail, notamment les escaliers et les accès.

En matière d'indemnisation, le fait que l'accident survienne alors que le travailleur est à son domicile n'entraîne pas une fin de non-recevoir à une réclamation, surtout si le domicile devient un lieu de travail. En effet, la réclamation d'un travailleur qui se blesse à domicile peut être acceptée par la CSST si celui-ci démontre que l'accident est survenu par le fait ou à l'occasion de son travail, c'est-à-dire alors qu'il exécutait ses fonctions professionnelles et non pas au moment où il accomplissait une tâche personnelle non liée au travail. À titre d'exemple, la réclamation d'une employée autorisée par son employeur à travailler à domicile a déjà été acceptée, puisque cette dernière a démontré qu'elle avait ressenti une douleur au dos en s'étirant pour aller chercher à bout de bras un dossier volumineux.

En cas d'accident, il est donc nécessaire d'effectuer une enquête approfondie pour déterminer dans quelles circonstances l'événement est survenu. Le travailleur, au moment de l'accident, était-il dans sa sphère personnelle et privée ou posait-il plutôt un geste pouvant être lié ou utile à son travail? Évidemment, les possibilités d'enquête seront limitées, puisque le travailleur est généralement le seul témoin de l'événement. Des questions de protection de la vie privée peuvent également être soulevées si l'employeur demande à inspecter le domicile du travailleur ou à prendre des photos.

En conséquence, il est recommandé de négocier et de signer une entente par laquelle l'employeur et le télétravailleur s'entendent entre autres sur l'espace de la résidence qui constitue le lieu de travail, sur le droit de l'employeur d'accéder à ce lieu pour évaluer les mesures de prévention ou pour faire enquête et sur la personne qui sera en charge de fournir l'équipement de travail.

En somme, les employeurs et les employés doivent redoubler de prudence en matière de santé et de sécurité du travail dans le cas d'un télétravailleur.

Geneviève de la Durantaye, CRIA, est avocate chez Ogilvy Renault S.E.N.C.R.L., s.r.l./L.L.P. Dès lundi, vous retrouverez le texte de cet article dans le portail de l'Ordre: www.portailrh.org