Il n'est jamais trop tard pour changer de carrière. Parlez-en à Steve Callaghan. À 50 ans, il a décidé de faire ce grand saut, après 28 ans de services pour le même employeur, et à 5 ans de sa retraite.

Ingénieur de locomotive, il a conduit des trains toute sa vie sur la Côte-Nord. Et il a adoré son travail. Mais les méthodes de travail avaient connu des changements énormes, qu'il trouvait difficiles à vivre.

 

«Auparavant, on roulait avec des équipes de trois ou quatre hommes par train, raconte-t-il. Après les changements, on se retrouvait seul, en pleine forêt, loin de tout. J'avais 50 ans, et je trouvais cela stressant.»

C'est alors qu'une occasion s'est présentée: le Bureau de sécurité des transports du Canada recherchait un enquêteur d'accidents ferroviaires. Il a postulé l'emploi, tout en pesant le pour et le contre.

Le cheminement

M. Callaghan a traversé les étapes classiques du cheminement à suivre dans un changement de carrière. Selon Hannah Besser, auteure du livre Changer de job, publié chez Transcontinental, la première étape consiste à se demander pourquoi on a envie de partir, et à s'interroger sur ses motivations profondes.

La plupart des gens qui veulent changer de carrière ressentent de l'insatisfaction au travail, explique Robert Figueroa, conseiller en orientation chez Enjeux Carrière.

«Cela peut être parce qu'ils ont plafonné et n'ont plus de défis à relever, dit-il. Ou encore, parce que des enjeux politiques et émotifs dans le milieu de travail font en sorte que l'environnement devient pénible.»

Après 28 ans sans horaire fixe, sur appel sept jours sur sept, tous les jours de l'année, Steve Callaghan rêvait d'un emploi du lundi au vendredi, de neuf à cinq. De plus, son entreprise venait de traverser une période difficile, avec deux conflits de travail.

«Le climat était malsain, assez pour que j'aille travailler à reculons. On avait réussi à me faire détester quelque chose que j'avais toujours aimé faire. Et il faut que tu sois heureux pour faire un travail!» dit-il.

Changer pour faire quoi?

Mais avant de changer, il faut avoir une idée de ce que l'on veut faire. «On doit se poser cette question en tenant compte de ses compétences transverses, dit Hannah Besser. Il s'agit des compétences que l'on peut prendre dans un métier pour les transférer dans un autre.»

En enquêtant sur les causes des accidents ferroviaires, Steve Callaghan mélangerait le travail de bureau et le travail sur le terrain. Son nouvel emploi serait très différent du premier, mais il mettrait à profit les connaissances et l'expérience acquises pendant 28 ans!

On doit aussi faire une analyse des risques reliés au changement. «Sachez bien quels sont ces risques, et quelles sont vos chances de réussite», dit Hannah Besser. Cette analyse doit tenir compte de nos proches, et de notre situation financière.

Avant de prendre sa décision, Steve Callaghan a consulté sa conjointe, car le changement d'emploi signifiait aussi changer de ville, et vendre la maison familiale. «C'est une décision de famille, tu ne fais pas ça tout seul», dit-il.

Il devait aussi évaluer attentivement les impacts financiers de sa décision. «Dans mon entourage, on ne comprenait pas pourquoi je voulais laisser cet emploi très payant, car pendant les premières années à mon nouveau poste, mon salaire diminuerait de près de 40%.»

Par contre, la caisse de retraite de la fonction publique, indexée au coût de la vie, était alléchante. De plus, il savait qu'il pourrait vendre sa maison facilement, et que le prix des maisons était faible dans l'autre ville.

Mais à ses yeux, l'important était qu'il aurait un nouveau style de vie, plus agréable, avec une vie sociale et familiale plus intéressantes.

«J'ai voyagé grâce à ce nouvel emploi, dit-il. Et j'avais enfin mes congés en même temps que tout le monde, et une vie de famille que je n'avais jamais eue avant.»

Faire le saut

Une fois que l'on a bien analysé la situation, il faut construire un projet professionnel crédible, dit Hannah Besser. «Méfions-nous des virages à 180 degrés, dit l'auteure. Quand on se présente auprès d'un employeur, il faut avoir un projet solide, être capable de bien expliquer ce que l'on veut faire, et pourquoi.»

Mais à un certain moment, il faut avoir le courage de faire le saut. «C'est un moment de choix très difficile. Mais quand on a suivi les étapes, si on a dressé un bilan solide, et construit un projet qui se tient, à un certain moment il y a ce déclic faisant en sorte que l'on va le concrétiser ou non», ajoute Mme Besser.

L'important, c'est d'avoir vraiment fait le point, croit l'auteure.

«Ainsi, on se donne toutes les chances de le réussir. Et si on ne réalise pas son projet, on saura exactement pourquoi, et on n'en gardera pas de frustration.»

Quand à Steve Callaghan, maintenant retraité, il croit qu'il faut foncer. À ceux qui pensent qu'il est trop tard passé un certain âge, il n'hésite pas à répondre:

«C'est de la foutaise de penser ça! On peut s'adapter à n'importe quoi! Il suffit de se dire qu'on accepte le défi et de foncer. Si les gens ont une occasion d'améliorer leur bien-être en changeant de situation, ils ne devraient jamais hésiter.»