Deux jours avant de céder la Maison-Blanche, l'administration Obama a porté plainte, mercredi, contre le Canada devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Elle soutient que la vente des vins de la Colombie-Britannique en épicerie contrevient aux accords internationaux et qu'elle désavantage les vins américains. Le Québec n'est pas à l'abri d'une telle plainte, selon un expert.

Depuis le printemps 2015, la Colombie-Britannique autorise ses vignerons à vendre leurs produits dans les épiceries de la province, où seuls sont offerts les vins locaux. Selon Washington, cette pratique discrimine les vins américains.

« Les règlements discriminatoires mis en place par la Colombie-Britannique compromettent intentionnellement la concurrence et semblent violer les engagements du Canada en tant que membre de l'OMC », affirme le représentant au commerce des États-Unis, Michael Froman, dans le communiqué diffusé par le gouvernement.

M. Froman somme par ailleurs le Canada et toutes les provinces de « suivre les mêmes règles. » Un passage de la plainte qui pourrait avoir des implications au Québec.

UNE MENACE POUR LE QUÉBEC ?

Le gouvernement Couillard a autorisé en décembre la vente des vins québécois en épicerie. La Presse avait révélé en octobre 2015 que les juristes de l'État avaient mis en garde à plusieurs reprises le ministre des Finances, avant l'adoption du projet de loi, que la vente des vins du Québec en épicerie pourrait contrevenir aux accords internationaux.

Le cabinet du ministre Leitão n'a pas voulu commenter la plainte des États-Unis, disant simplement que « la situation ici est différente ».

Richard Ouellet, professeur titulaire en droit international économique à la faculté de droit de l'Université Laval, croit cependant que le Québec pourrait faire face à une contestation internationale.

« Le Québec est à risque, mais il faut comparer les marchés, explique-t-il. Sur le marché britanno-colombien, cette mesure [des vins locaux en épicerie] a bouffé des parts de marché aux vins américains. Tandis qu'au Québec, ça ne semble pas avoir créé des pertes pour des vins étrangers jusqu'à maintenant. »

Au domaine Les Brome, Léon Courville a été l'un des premiers à faire pression pour que les vins du Québec soient vendus en épicerie. Il ne craint pas que la province subisse les contrecoups de la plainte américaine devant l'OMC.

« Je ne crois pas que les vins du Québec en épicerie soient une menace pour les vins étrangers, dit-il. On est une goutte dans l'océan. »

De son côté, l'Ontario, qui possède aussi un monopole d'État semblable à la Société des alcools du Québec, a rendu possible la vente de vin en épicerie l'automne dernier. Contrairement au Québec et à la Colombie-Britannique, les vins étrangers et locaux ont droit à ce nouveau marché.

LES VINS EN ÉPICERIE

Seuls les vins importés en vrac et embouteillés dans la province étaient jusqu'à tout récemment vendus en épicerie. Or, depuis décembre, les vins du Québec et les autres boissons alcooliques artisanales obtenues par fermentation s'y trouvent aussi. Les alcools, les boissons fortifiées et les spiritueux n'ont pas accès à ce nouveau marché. Québec autorise désormais la mention de cépage et d'année de vendange sur les bouteilles vendues en épicerie.