Les petits commerçants reviennent à la charge contre les frais de traitement des cartes de crédit, qu'ils jugent trop élevés. Le géant américain Walmart leur a donné un coup de pouce hier en annonçant qu'il n'accepterait plus les cartes de crédit Visa dans ses magasins du Manitoba.

1,5 %

Le ministre fédéral des Finances, Bill Morneau, a indiqué mercredi qu'il avait reçu les résultats d'une vérification concluant que « les sociétés Visa et MasterCard ont toutes deux respecté leurs engagements respectifs », engagements pris en 2014 et entrés en vigueur en avril 2015, soit de les réduire de 1,6 % ou plus à une moyenne maximale de 1,5 %. Malgré tout, Ottawa a fait part de son intention de réaliser « une autre évaluation des frais », sans toutefois donner plus de précisions. Le Conseil canadien du commerce de détail a qualifié d'« encourageante » cette promesse du gouvernement libéral.

INSATISFAITS

Les commerçants canadiens, petits et grands, demeurent toutefois largement insatisfaits de la modeste baisse des frais accordée par Visa et MasterCard. « Comment se fait-il que le traitement d'une carte de débit ne coûte que de 5 à 10 cents par transaction ? », demande Florent Gravel, PDG de l'Association des détaillants en alimentation (ADA) du Québec. Les commerçants rêvent qu'Ottawa emboîte le pas à l'Australie et à l'Union européenne, qui ont toutes deux plafonné les frais à 0,5 % ou moins. « Notre gouvernement s'est fait endormir au chloroforme par les compagnies de cartes de crédit », dénonce M. Gravel.

SUBVENTION?

Les petits commerçants sont d'autant plus en colère qu'ils disent ne pas avoir vraiment bénéficié de la réduction des frais. André Forget, propriétaire de deux stations-service Beau-Soir à Repentigny et à Terrebonne, confie qu'en vertu de son contrat d'approvisionnement avec Petro-Canada, il doit acquitter des frais de 1,8 % sur chaque transaction réglée par carte de crédit. Selon l'ADA, qui représente pourtant des commerçants affiliés aux chaînes Loblaws, Metro et IGA, « les plus petits détaillants subventionnent les taux privilégiés offerts aux grands groupes ». « Si Walmart trouve qu'il paie trop cher, imaginez ce que c'est pour moi », note M. Forget.

WALMART

Walmart a annoncé hier la deuxième étape de sa croisade dans ce dossier. À partir du 24 octobre, ses 16 magasins du Manitoba n'accepteront plus les cartes de crédit Visa, décision que cette dernière a qualifiée de « décevante ». À la mi-juillet, Walmart avait amorcé son boycottage de Visa dans ses trois magasins de Thunder Bay, en Ontario. Alex Roberton, porte-parole de Walmart, a assuré que les clients s'étaient « ajustés » au changement, mais il n'a pas voulu préciser s'il y avait eu un impact sur les ventes. Il a aussi refusé de divulguer le taux des frais que Visa impose à Walmart.

BÊTISES

N'en ayant pas les moyens, de nombreux petits commerçants n'acceptent pas les cartes de crédit. Mais ils le font parfois à leurs risques et périls. Franck Hénot, propriétaire de la boutique de fromage Bleu & Persillé, avenue du Mont-Royal, refuse les cartes de crédit pour les achats de moins de 10 $. « Vous ne pouvez pas vous imaginer les bêtises que je reçois », lance-t-il. Il a trouvé une façon d'obtenir un meilleur taux en devenant membre de l'Association des restaurateurs du Québec, mais ce taux demeure plus élevé que celui de l'Intermarché Boyer, affilié à Loblaw, dont il est aussi propriétaire.