Même si Sobeys Québec (IGA) a annoncé hier une baisse de 5 à 7% des prix d'environ 60 % de ses produits non périssables, sa marge de profit restera la même.

En plus d'avoir renégocié avec ses fournisseurs, l'épicier proposera des soldes moins prononcés à ses clients, explique l'analyste Keith Howlett, de Desjardins Marché des capitaux.

Dans une note envoyée aux investisseurs, l'expert du secteur de la vente au détail souligne que les 8500 réductions de prix sont notamment rendues possibles « par une réduction des rabais ».

D'après sa compréhension du dossier, Sobeys Québec va réduire l'écart entre ses prix courants et ses prix en solde. Par exemple, des biscuits à 4 $ la boîte qui tombaient parfois à 2 $ continueront d'être soldés à 2 $. Mais puisque leur prix courant sera désormais de 3,50 $, il s'agira, en pourcentage, d'un rabais moindre.

La porte-parole du détaillant, Marie-Noëlle Cano, a nié que les rabais seraient désormais moins alléchants. « Ça n'a pas d'impact sur la qualité des promotions en circulaire. »

Dans son communiqué de presse, Sobeys a précisé hier qu'il utilisait entre autres les économies réalisées par l'abandon du cadeau de la semaine pour réduire ses prix courants.

DÉCISION QUI TOMBE À POINT

Des trois grands de l'alimentation au pays, Sobeys est le seul à ne pas exploiter d'enseigne à bas prix au Québec - Metro possède Super C et Loblaw détient Maxi. Or, le consommateur se tourne de plus en plus vers les commerces à prix réduits en raison de la situation économique. Une situation qui peut surtout nuire à Sobeys, souligne Keith Howlett.

Au Québec, les enseignes au rabais détiennent 38 % des parts de marché, ce qui se compare à 51 % en Ontario, selon Nielsen. « Sobeys ne veut surtout pas que les parts de marché de ce créneau au Québec atteignent le niveau ontarien », note l'analyste. Ce qui explique sans doute pourquoi il baisse ses prix.

« Étant donné la hausse des ventes comparables de Costco et Walmart, je comprends la décision d'IGA, surtout que cette baisse de prix paraît bien sur le plan communicationnel avec les consommateurs. », explique Jordan LeBel, expert en marketing alimentaire à l'Université Concordia.

Florent Gravel, PDG de l'Association des détaillants en alimentation du Québec (ADA), estime pour sa part que la stratégie d'IGA tombe à point, compte tenu de la situation économique. « C'est une décision audacieuse de la part de Sobeys. [...] C'est sûr que les marchands sont contents. Mais est-ce que ça va amener le consommateur à bouger [pour changer de supermarché] ? »

Un marchand à qui nous avons parlé sous le couvert de l'anonymat - il n'est pas autorisé par Sobeys à s'adresser aux médias - accueillait positivement la nouvelle stratégie marketing. Il a qualifié les baisses de prix de « spectaculaires ».

RÉACTION DES CONCURRENTS INÉVITABLE

Keith Howlett affirme que la stratégie de Sobeys « requiert » une réponse de Loblaw (Provigo) et Metro. Les deux entreprises devront décider si elles changent ou non leurs prix courants et leurs niveaux de soldes, écrit-il.

Un point de vue partagé par Florent Gravel. « Normalement, il devrait y avoir une contre-attaque. C'est certain qu'il va y avoir une réaction. Les gens de marketing sont déjà sur leur table à dessin. J'ai hâte de voir avec quoi ils vont nous arriver. Metro offrira-t-elle plus de points m ? »

« On se déplace probablement vers une période de déséquilibre en ce qui concerne les prix dans l'industrie de l'alimentation. Cela, à notre avis, réduit la prévisibilité des résultats [qu'obtiendront les chaînes de supermarchés] », conclut l'analyste de Desjardins.

DES BAISSES DE PRIX POSSIBLES GRÂCE À : 

- L'abolition du cadeau de la semaine et d'autres types de promotions ;

- La simplification des processus d'affaires avec les fournisseurs ;

- « D'importantes négociations avec les fournisseurs », c'est-à-dire des réductions du prix de gros.