En ce lendemain de soldes d'après-Noël, Sears annonce la fermeture prochaine de 100 à 120 magasins à la suite de ventes décevantes pendant la période des Fêtes. Le Canada est épargné, mais la filiale canadienne n'est toutefois pas à l'abri des difficultés. Son nouveau patron parle même d'une crise d'identité.

Bien que détenue à 92% par Sears Holdings, Sears Canada est considérée comme une entreprise indépendante avec son président et son conseil d'administration. «Aucun magasin Sears ne sera fermé» au pays, soutient sa porte-parole Alicia Richler dans un courriel reçu en fin de journée.

Par voie de communiqué publié hier, Sears Holdings a annoncé la fermeture prochaine aux États-Unis de 100 à 120 magasins Sears et Kmart, cette seconde bannière lui appartenant également. La localisation des magasins ciblés sera connue ultérieurement.

Dans les huit semaines précédant Noël, la période la plus faste de l'année pour les détaillants, les ventes de magasins ouverts depuis au moins un an sont en baisse de 5,2%. Le détaillant prévient en outre qu'il n'essaiera plus de redresser ses magasins moins performants, ce qui ouvre la porte à d'autres fermetures dans un avenir prévisible.

Un fouillis en magasin

Au Canada, la situation n'est pas plus rose. Au troisième trimestre, terminé le

29 octobre, les ventes de magasins ouverts depuis au moins un an ont glissé de 7,8%. La filiale canadienne a enregistré une perte de près de 47 millions, comparativement à un profit de 21 millions au trimestre correspondant de 2010. Les chiffres de la période des Fêtes 2011 ne sont pas encore connus.

Calvin McDonald, président de Sears Canada depuis juin, a envoyé en juillet un mémo interne à ses employés qui a fait grand bruit dans les médias. Il y soutenait que Sears avait un problème d'identité tout en déplorant le fouillis régnant dans ses magasins, dont l'aménagement manquait d'efficacité. À la fin du mois de novembre, 70 personnes ont perdu leur emploi au siège social canadien.

«Sears a un sérieux problème d'image, commente Jean-Claude Gagnon, spécialiste du commerce de détail et président de la firme de consultants ABC Détail. C'est rendu qu'on va magasiner chez Sears après avoir essayé partout avant.»

Pour ce spécialiste, la tâche de redresser Sears constitue un défi colossal. Le consultant ne serait guère surpris si l'arrivée prochaine de Target venait lui porter le coup de grâce.

M. McDonald, qui est passé par Loblaws, veut réaménager l'intérieur de ses magasins en mettant en valeur les matelas, les électroménagers et autres gros articles. Les observateurs se demandent toutefois de quels moyens disposera le nouveau patron.

D'après Keith Howlett, analyste boursier de Desjardins suivant le titre de Sears Canada, M. McDonald disposera d'environ 60 millions par année en immobilisations, soit la moitié moins que ses principaux rivaux. Sous le contrôle d'Edward Lampert, gestionnaire de fonds de couverture, Sears Holdings a réduit considérablement les investissements dans ses magasins aux États-Unis, à environ 1,45$ US du pied carré, comparativement à une dépense de 5,40$ US pour ses concurrents, selon la firme Trendex North America.

Au Canada, Sears est con­fronté à la concurrence accrue des autres détaillants qui fourbissent leurs armes en prévision de l'entrée en scène de l'américain Target au Canada, prévue en 2013.

Des soldes de l'après Noël appréciés

Ailleurs que chez Sears, les réjouissances se poursuivent. Il faut dire que la période des Fêtes 2011 s'annonçait prometteuse pour la plupart des détaillants. Un sondage réalisé pour le compte du Conseil québécois du commerce de détail estimait que 75% des Québécois allaient dépenser autant sinon davantage que l'an dernier.

En ce lendemain de la célèbre journée des soldes de l'après Noël, certains commerçants se frottent d'ailleurs les mains. «On a vu une grosse augmentation au niveau des tablettes, qui prennent la place des ordinateurs portatifs, observe Patrick Lavoie, directeur marketing de Best Buy au Québec. Le Blackberry Playbook s'est le plus vendu lundi.» À 199$ l'unité, la tablette de RIM se vendait au prix d'une liseuse électronique.

La journée du 26 décembre mettait ainsi un terme d'agréable façon à la période des Fêtes. «On a doublé nos ventes sur Bestbuy.ca pour la période du 24 décembre au soir jusqu'à lundi en fin de journée», précise M. Lavoie.

Même sentiment de satisfaction chez Clément, le détaillant québécois de meubles et vêtements pour enfants, qui célèbre l'après Noël en payant les taxes toute la semaine.

«Ça me prendrait des patins», dit Jean Clément, secrétaire-trésorier, que l'on a joint au téléphone au magasin du boulevard Pierre-Bertrand, à Québec. «Avec l'augmentation de la TVQ la semaine prochaine, ça fait une grosse différence [sur l'achalandage]», explique-t-il en reprenant son souffle.

Lui aussi constate une forte activité sur l'internet. «En achetant en ligne, les clients profitent des spéciaux d'après- Noël, sans avoir à quitter la famille», dit-il.