Propriétaires de locaux réticents, loyers parfois très élevés, taux d'inoccupation très bas: plusieurs facteurs jouent contre les détaillants qui recherchent des endroits où s'établir pour une courte période.Et ce, qu'on soit à Montréal ou en banlieue, dans des centres commerciaux ou sur rue. «On loue plus cher, car ces gens-là viennent dans les meilleurs mois de l'année, dit Marcel Blouin, gestionnaire des Galeries Laval, en réaménagement présentement. Le prix de location est trois fois plus élevé.»

Le taux d'inoccupation dans les centres régionaux, en dehors du centre-ville de Montréal, est de 3,72%, selon Groupe Altus. Aussi, les baux temporaires ne représentent que 1,07% de toutes les locations en centres commerciaux. «À la Place Rosemère, le local temporaire de Plantes et Décors Véronneau était autrefois occupé par un magasin Dumoulin qui a fait faillite, raconte Frédéric Labrie, directeur au Groupe Altus. Si (le propriétaire) Investissements Morguard avait eu une location sur 10 ans, il n'y aurait pas eu de temporaire. C'est un peu un dernier recours.»

Du côté de Canmarc, qui possède 8,8 millions de pieds carrés de locaux commerciaux au Canada (Plaza Alexis Nihon, Place Longueuil, Centre Laval), le taux d'occupation est de 96%. «C'est donc souvent une coïncidence quand un temporaire s'établit, estime Guy Charron, vice-président directeur et chef de l'exploitation Québec de Canmarc. On préfère des baux de 1 à 10 ans. Mais la clientèle apprécie ces commerces temporaires.»

«On ne le fait pas par choix, mais pour que les lumières soient allumées à côté d'un locataire permanent et qu'il y ait de l'achalandage», résume Marcel Blouin.

Les clauses d'exclusivité que certains locataires à long terme peuvent brandir raréfient davantage l'espace disponible en centre commercial et dans des endroits comme le Quartier Dix30. «Il n'y a pratiquement pas d'espaces disponibles dans les bons secteurs, dit Robert Ménard, vice-président, services aux commerces de détail, de la firme immobilière CB Richard Ellis. Ni dans les vieux centres commerciaux ni dans les nouveaux.»

Parlez-en à Mohamed Doutabaa. «En 2007, j'ai ouvert un magasin temporaire d'Halloween sur le boulevard Crémazie, raconte le propriétaire des magasins Imagine Le Fun. L'an dernier, j'ai voulu refaire la même chose, j'ai cherché pendant deux mois un local avec du stationnement, mais je n'ai rien trouvé.»

Dans un tel contexte, le commerce temporaire ne devrait pas devenir une tendance. Contrairement aux États-Unis où les Halloween City et les Ricky's Costumes Superstores se multiplient. «Aux États-Unis, il y a 1500 magasins temporaires, note Lynda Bouvier, propriétaire de Party Expert et de Groupe Festi-Fêtes Location. Party City, la plus grosse chaîne, a ouvert 300 Halloween City cette année.»

«On dit qu'aux États-Unis, il y a plus du double de pieds carrés d'espaces commerciaux disponibles par habitant par rapport à ici», note Robert Ménard.

Si des Party Expert et Véronneau trouvent des niches et peuvent ouvrir des magasins d'année en année, c'est qu'ils ont une bonne réputation auprès des propriétaires. Ce n'est pas le cas de tous les spécialistes du temporaire. «Il n'y a plus de place pour les gens peu connus, note Robert Ménard. Ce n'est pas bon pour un centre commercial d'avoir un locataire de seconde classe qui disparaît trois semaines plus tard. Ça ne paraît pas bien.»

«C'est une business! lance Guy Véronneau, de Plantes et Décors Véronneau. C'est temporaire, mais c'est un pensez-y-bien. Il faut être solide financièrement.»

Car les frais d'implantation sont élevés pour un commerce où tout se joue dans certains cas durant les deux dernières semaines d'activités. C'est que le propriétaire n'investit rien dans un local loué temporairement. «On doit débourser pour l'éclairage, les tapis, le chauffage, l'installation de murs temporaires, l'embauche d'employés temporaires, les scanneurs, l'enseigne extérieure et l'autre au bord de la rue, les permis et la pub, énumère Guy Véronneau. Cette année, ça nous a coûté 75 000$. On ne fait pas d'argent la première année, mais un investissement. Et encore, il se peut qu'on ne puisse pas s'établir au même endroit l'année suivante, si le local est pris par un autre.»

«C'est aussi beaucoup plus de travail car le magasin n'est pas connu, ajoute Lynda Bouvier. Ça nous coûte plus de 200 000$ en publicité pour l'ensemble de l'Halloween.»

Heureusement, les ventes sont appréciables et les clients changent de costume chaque année!