La vive concurrence des supermarchés se transformera-t-elle en bagarre publicitaire devant les tribunaux?

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Toujours est-il que la chaîne des supermarchés IGA s'adresse à la justice pour forcer le retrait d'une publicité télévisuelle de sa rivale Metro parce qu'elle serait «fausse» et «trompeuse».

La faute, selon IGA? Dans sa publicité diffusée sur plusieurs chaînes de télé depuis la mi-septembre, Metro affirme être «la plus grande famille d'épiciers québécois».

«C'est une affirmation trompeuse de Metro qui porte préjudice à l'image de marque d'IGA ainsi qu'à ses nombreux détaillants affiliés au Québec», a résumé Marc Poulin, président de Sobeys Québec - l'entreprise qui chapeaute IGA - au cours d'un entretien avec La Presse Affaires.

Selon M. Poulin, la publicité de Metro est trompeuse à deux niveaux.

D'abord, il serait faux de laisser entendre qu'il y a plus de supermarchés Metro et Metro Plus au Québec que de supermarchés IGA et IGA Extra.

Dans sa demande d'injonction contre Metro, Sobeys affirme qu'il y a 269 supermarchés IGA ou IGA Extra au Québec, comparativement à 214 supermarchés Metro ou Metro Plus.

Sobeys affirme aussi que, contrairement à ce que laisserait entendre la publicité de Metro, les supermarchés IGA ont plus de parts de marché que leurs concurrents Metro au Québec (21% comparativement à 13,3%) dans le créneau des supermarchés à services complets.

Par ailleurs, selon Marc Poulin, de Sobeys, la campagne publicitaire de Metro affirmerait le caractère «québécois» de ses supermarchés d'une façon préjudiciable pour l'enseigne IGA.

«Cette publicité de Metro risque de créer une perception parmi les consommateurs que les marchands IGA ne seraient pas québécois. C'est un non-sens qui porte atteinte à nos bannières qui regroupent surtout des entrepreneurs québécois», a-t-il souligné.

Dans sa demande d'injonction, Sobeys soutient que ses enseignes IGA et IGA Extra comptent 252 «détaillants affiliés» au Québec. Il s'agit de propriétaires de supermarchés qui ont un contrat d'affaires à long terme avec IGA pour leurs approvisionnements et leur commercialisation.

En comparaison, selon Sobeys, les enseignes Metro et Metro Plus ne compteraient plus que 172 détaillants affiliés au niveau local. Les 42 autres supermarchés Metro et Metro Plus seraient des propriétés directes de la société Metro.

Au siège social de ce détaillant, on préférait hier s'abstenir de répondre aux doléances de Sobeys avant la première audience en cour, prévue pour demain au palais de justice de Montréal.

«Les arguments de Sobeys ne sont pas fondés. Nous entendons les contester en cour», a indiqué Marie-Claude Bacon, porte-parole de Metro.

Dans le milieu publicitaire, cependant, on constatait une «démarche inhabituelle» dans le milieu du commerce de détail au Québec, entre deux concurrents dominants dans leur secteur.

«Ce type de disputes publicitaires entre concurrents est souvent réglé à l'amiable et en privé. Lancer une requête en justice se trouve aussi à rendre publique une telle dispute. Il y a sans doute d'autres raisons de stratégie commerciale derrière ça», a suggéré Yanik Deschênes, président de l'Association des agences de publicité du Québec.

Il faut remonter au début de 2010 pour voir une telle dispute publicitaire entre concurrents qui se retrouve en justice au Québec. Bell avait alors intenté une poursuite en dommages de 50 millions contre Vidéotron pour publicité mensongère sur son service d'accès à l'internet.

Envers Metro, la démarche judiciaire de Sobeys se limite encore à une demande d'injonction pour forcer le retrait d'une publicité que l'on estime «trompeuse».

Dans sa requête, toutefois, Sobeys prétend à un «préjudice sérieux et irréparable» à l'image de marque de ses supermarchés IGA au Québec et elle envisage des «recours en dommages éventuels» contre Metro.