«Bienvenue à Montréal», peut-on lire sur le t-shirt noir. Depuis samedi, le gorille installé à la porte du commerce NRJ Jeans, dans le Vieux-Montréal, accueille les touristes avec cynisme. Car sous le mot de bienvenue du t-shirt qu'il porte sont imprimés les dessins de ponts qui s'écroulent et de voiture roulant sur une route abîmée que le caricaturiste Yvon Roy a publié sur son site, il y a deux semaines.

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L'idée des t-shirts vient du propriétaire de la boutique de la rue Notre-Dame Ouest. «On en a fait imprimer une cinquantaine et on en a rapidement vendu 35, affirme Moshe Simhon. Les touristes européens trouvent ça comique.»

Le concept est né quelques jours après l'effondrement d'une poutre dans le tunnel Viger de l'A720, à quelques pas du commerce.

Un bon endroit en temps normal pour faire des affaires d'or l'été. Mais depuis deux ans, la multiplication des travaux, qui forcent la fermeture de plusieurs tronçons de rues dans le coin, doublée de la présence d'un édifice barricadé dont le toit s'est écroulé en mars dernier juste devant NRJ Jeans ont fait fondre le chiffre d'affaires du commerce de Moshe Simhon. «De 60% cet été, affirme le propriétaire. Et l'an dernier, c'était dur déjà, car les rues étaient aussi bloquées. La semaine dernière, cinq autobus de touristes français n'ont pu se présenter à mon magasin à cause de la fermeture du tunnel Viger. C'est chaque fois 50 personnes qui dépensent de 1000$ à 2000$.»

Vendu 15$, le t-shirt «Bienvenue à Montréal» a coûté près de 10$ à produire. Ce n'est donc pas avec ce produit que Moshe Simhon renflouera ses coffres. «Je n'essaie pas de faire de l'argent avec ça, précise-t-il. Je veux passer un message. Je veux qu'on porte ce chandail pour protester.»

Moshe Simhon en a contre la Ville de Montréal qui, à ses yeux, tarde à régler les problèmes de circulation, à boucler les rénovations du quartier et peine à entretenir certaines infrastructures.

Dans sa croisade, il s'est rapidement trouvé un allié: Allan Goldberg, président de Jack of All Trades, qui a pris le relais de l'impression des t-shirts à plus grande échelle. «On en a imprimé 600 et on pense en imprimer 1000 supplémentaires, dit Allan Goldberg. On s'apprête à en distribuer dans une vingtaine de boutiques à Montréal. On essaie d'intéresser L'Aubainerie et Simons. Je veux que tout le monde voie le chandail. Un chandail porté peut être vu par 1000 personnes et, je l'espère, par des gens du gouvernement.»

L'image de la Ville risque-t-elle d'être ternie, en pleine saison touristique? «L'image forte de Montréal, c'est son effervescence et ses activités estivales qui sont très courues, répond Ariane Lareau, porte-parole de la Ville de Montréal. C'est ce qui meuble les souvenirs des visiteurs.»

«L'image de Montréal est assez mauvaise comme ça, estime de son côté Frédéric Metz, spécialiste des marques, chroniqueur et professeur en graphisme retraité de l'UQAM. Cela dit, ce genre d'initiative n'est pas à propos, même si j'adore l'humour grinçant. On devrait plutôt donner les t-shirts, faire une pétition ou utiliser Facebook. Bloquer une rue par exemple peut faire réagir la Ville.»