«Espérez davantage, payez moins. »

C'est le slogan - traduit librement - autour duquel le détaillant américain Target articule sa stratégie d'affaires depuis des années.

Et qui l'a mené au deuxième rang des plus grosses entreprises de magasins à rayons aux États-Unis, tout juste derrière Walmart.

Maintenant, Target veut étendre cette stratégie au Canada et au Québec, mais de façon plus empressée qu'aux États-Unis.

On savait déjà que Target veut entrer en force au Canada - sa première expansion hors des États-Unis - en s'emparant pour 1,8 milliard $CA des baux de la plupart des emplacements de magasins Zellers.

Cette entente a été conclue en début d'année avec la société-mère de Zellers, le groupe HBC (La Baie) de Toronto, lui aussi sous propriété américaine depuis quelques années.

Cette semaine, Target a confirmé un premier lot de 105 emplacements Zellers qu'il prévoit convertir à son enseigne en 2013, après les avoir rénovés de fond en comble.

Parmi ces 105 sites prioritaires, 19 sont au Québec et 11 dans la seule région de Montréal.

Toutefois, ce premier lot de magasins ne correspond qu'à la moitié de ses ambitions déclarées au nord de la frontière.

Target vise à ouvrir au moins 200 magasins à rayons et réaliser quelque 6 milliards $CA de chiffre d'affaires au Canada «d'ici la fin de la décennie », ont vanté ses dirigeants, mercredi à Chicago lors d'une rencontre avec des médias canadiens.

Les ambitions de Target trouveront-elles un marché fertile au Canada et au Québec ?

Peu d'analystes en doutent, dans la foulée de l'essor retentissant de Walmart au Canada depuis 15 ans.

«Comme Walmart, Target est un as de la gestion d'inventaire qui devrait s'avérer très concurrentiel dans toutes ses catégories en magasins », anticipe Marie-Claude Frigon, spécialiste du commerce de détail chez la firme-conseils RSM Richter Chamberland, à Montréal.

Chez Valeurs mobilières Desjardins, l'analyste principal des détaillants, Keith Howlett, s'attend aussi au succès de Target au Canada, mais surtout au détriment des trois grandes chaînes actuelles de magasins à rayons : Walmart, Sears et La Baie/The Bay.

Cette concurrence de Target sera la plus forte dans les catégories des vêtements d'usage courant et des articles résidentiels.

En alimentation, cependant, des doutes persistent quant à l'intérêt réel de Target de développer ce créneau, déjà très concurrentiel au Canada, comme il l'a fait aux États-Unis où le marché est plus fragmenté.

Entre temps, la visite d'un nouveau magasin Target à Chicago, mercredi, a permis de constater les atouts de ce détaillant.

L'aménagement du magasin s'avère plus pratique et convivial que la moyenne pour ce genre de grandes surfaces généralistes à prix restreints.

Aussi, l'offre en magasin met l'accent sur les nombreuses marques privées de Target dans toutes les catégories, avec des articles exclusifs et de qualité bien calibrée.

Parmi les gestionnaires de centres commerciaux au Canada, on ne doute pas de l'attrait de cette «formule Target» parmi les consommateurs canadiens.

Certains d'entre eux ont déjà déclaré leur intérêt à remplacer un locataire devenu stagnant et encombrant, Zellers, par un nouveau-venu américain réputé beaucoup plus dynamique.

Ils anticipent que l'implantation d'un Target dans leurs centres commerciaux en rehaussera l'achalandage de consommateurs et, du coup, les tarifs de location.

C'est l'une des raisons pour laquelle Target est parvenu un peu plus rapidement que prévu à négocier la reprise des baux pour une centaine d'emplacements de Zellers avec les principaux exploitants de centres commerciaux.

Et ce, tout en obtenant des concessions pour certaines conditions financières des baux, comme la quote-part des ventes au-delà d'un certain niveau.

Parmi ces nouveaux partenaires immobiliers de Target au Canada, on compte la société Ivanhoé Cambridge, une filiale de la Caisse de dépôt et placement du Québec, et la montréalaise Westcliff Management.

Ces deux sociétés comptent 19 des 105 emplacements Zellers priorisés par Target, dont neuf sont situés au Québec.