L'arrondissement de Mercier-Hochelaga-Maisonneuve compte amender son nouveau règlement qui interdit les livraisons de nuit afin de répondre aux inquiétudes des marchands, a indiqué hier le maire Réal Ménard. Les commerçants craignent que ce projet nuise au développement économique de leur quartier.

«J'ai demandé des amendements à notre règlement, a indiqué M. Ménard en entrevue téléphonique. La forme précise que tout cela va prendre, je l'ignore. Mais nous sommes très sensibles au fait que de petits commerces qui ne font pas de la manutention de marchandise à grande échelle peuvent être touchés, et on va essayer de contrer cela.»

L'arrondissement a tenu une rencontre publique d'information pour présenter le règlement, mardi dernier. Dans sa forme actuelle, il interdirait toute livraison commerciale entre 22 h et 7 h, une mesure qui touche près de 270 commerces. Les contrevenants sont passibles d'amendes de 100 $ à 300 $ pour la première infraction, lesquelles peuvent atteindre 1000 $ à partir de la troisième infraction.

Depuis des mois, des résidants se plaignaient du bruit causé au petit matin par les camions de livraison. La mesure vise essentiellement les supermarchés de grande surface. Mais peu après sa présentation, ce sont les petits commerçants qui s'y sont opposés.

La propriétaire de la boulangerie Arhoma, rue Ontario, affirme que le règlement menace son commerce. L'établissement, sis place Valois, attire chaque midi des dizaines de clients qui savourent un lunch, prennent un café ou accrochent une baguette sur le pouce. Mais les ventes en magasin ne constituent qu'une fraction des revenus de la petite entreprise : une trentaine d'hôtels et de restaurants du centre-ville lui achètent chaque jour des croissants et des pains.

Ces clients commerciaux veulent recevoir la marchandise à temps pour le déjeuner, soit 6 h au plus tard, explique Mme Beaumont. Et si l'arrondissement interdit les livraisons de nuit, elle ne pourra expédier ses croissants à l'heure.

«Dans tout ce qui touche le secteur alimentaire, on a tendance à oublier que les gens veulent des produits frais, explique Mme Beaumont. Mais le coût de cela, c'est que les produits doivent être fabriqués et livrés tôt le matin.»

De prime abord, le nouveau règlement aura peu d'effet sur les affaires courantes des marchands, reconnaissent les sociétés de développement commercial (SDC) Promenade Ontario et Promenade Sainte-Catherine Est. Mais ces regroupements, qui représentent ensemble plus de 300 entreprises, craignent que la mesure rende l'arrondissement moins attrayant pour les commerces sur rue.

Depuis des mois, la directrice de la SDC Promenade Sainte-Catherine Est, Noémie Lucas, multiplie les démarches pour attirer de nouveaux commerces dans son quartier. Elle craint que le règlement sur les livraisons n'incite des entrepreneurs potentiels à s'établir dans d'autres secteurs où la réglementation est moins stricte.

«Nous aimerions beaucoup voir une boulangerie s'établir chez nous, illustre-t-elle. Mais si Arhoma a des problèmes à cause du nouveau règlement, ça ne jouera pas en notre faveur.»