Alimentation Couche-Tard (T.ATD.B) a perdu hier la première manche dans sa tentative de faire déclarer illégales les méthodes de recrutement utilisées par la CSN dans ses succursales. La Commission des relations de travail (CRT) a refusé de rendre une ordonnance qui aurait empêché des employés de la centrale de visiter des dépanneurs pour remettre des cartes aux travailleurs.

Dans une requête déposée vendredi dernier, l'entreprise a demandé au tribunal de faire cesser sur-le-champ ce qu'elle considère être de la sollicitation illégale. Dans une décision rendue hier, la CRT a refusé d'accorder une telle ordonnance. Elle entendra la cause mardi.

La semaine dernière, la CSN a annoncé que la douzaine d'employés d'un dépanneur du quartier Villeray ont déposé une demande d'accréditation syndicale, une première au Québec. À l'occasion, elle a affirmé que ses équipes ont visité d'autres établissements Couche-Tard afin de convaincre d'autres employés de se joindre à eux.

L'entreprise s'est adressée à la CRT deux jours plus tard. Selon elle, la campagne contrevient au Code du travail, qui interdit aux syndicats de solliciter des adhésions pendant les heures du travail.

Preuves vidéo

Pour appuyer sa requête, Couche-Tard a déposé des déclarations sous serment de 17 cadres, gérants et employés.

L'entreprise affirme que des représentants de la CSN se sont présentés dans ses dépanneurs, qu'ils y ont acheté un produit quelconque, et qu'ils en ont profité pour glisser une carte aux employés en service.

Elle a d'ailleurs produit des enregistrements vidéo captés dans quatre dépanneurs, et des exemplaires des cartes remises aux employés.

«Dans les Couche-Tard, un syndicat CSN pour se faire respecter! Appelle-nous (mais pas à partir du Couche-Tard). Maintenant. C'est confidentiel», peut-on lire sur les cartes.

La CSN ne cache pas son désir de recruter des employés de la chaîne. Mais elle nie avoir formellement sollicité des adhésions pendant les heures de travail. Elle admet avoir échangé avec certains travailleurs dans des dépanneurs, mais uniquement pour les inciter à communiquer avec la centrale s'ils désirent obtenir plus d'information.

«Il n'échappe à personne que le but ultime de toute cette opération, orchestrée par la CSN, est de recueillir le plus grand nombre d'adhésions possible auprès des employés de Couche-Tard, écrit la commissaire Andrée Saint-Georges dans sa décision rendue hier. Mais il n'est pas démontré que lors de ce premier bref contact, elle cherche aussitôt à leur faire signer une carte de membre.»

«Poursuite-bâillon»

La CSN a dénoncé hier ce qu'elle appelle une «poursuite-bâillon».

Elle promet de poursuivre sa campagne.

«La CSN ne lésinera pas sur les moyens pour défendre les droits de tous les employés de Couche-Tard et pour contrer toute tentative d'intimidation», a affirmé le vice-président de la centrale, Roger Valois.

«Il est faux de dire que Couche-Tard a voulu bloquer la demande de la CSN, a rétorqué la porte-parole de l'entreprise, Denise Deveau. On a tout simplement fait valoir l'article 5 du Code du travail.»

En novembre 2009, Couche-Tard a fermé une succursale de Saint-Mathieu-de-Beloeil dont les travailleurs étaient en voie de s'associer. Mais, contrairement à ceux de la rue Jean-Talon, ils n'avaient pas présenté une demande d'accréditation à la CRT, a indiqué la CSN.