Qu'on vende des saucisses ou qu'on joue au hockey, il ne faut jamais abandonner la partie. Jean Cusson en sait quelque chose. Cet ex-hockeyeur professionnel était acculé à la faillite lorsque sa petite entreprise a finalement pris son envol. Aujourd'hui, le fondateur de la bannière William J. Walter dirige une entreprise qui compte 26 succursales et dont le chiffre d'affaires avoisine les 6 millions de dollars.

Le plan de match de l'entreprise se résume en un mot: la variété. Elle propose une cinquantaine de saveurs. La William Suisse farcie à l'emmenthal, la saucisse au chou rouge et celle aux canneberges côtoient les grands classiques comme la toulouse, l'italienne et la merguez.

«En 1986, quand nous avons lancé l'entreprise, personne ne faisait des variétés, relate Jean Cusson. On a été les premiers à créer ce concept. Aujourd'hui, je constate que plusieurs supermarchés et bouchers le font.»

Quinze ans en Suisse

À la fin des années 60, cet ailier gauche joue deux saisons avec l'équipe nationale du Canada avant de faire le saut dans la Ligue nationale de hockey. Son séjour avec les Seals d'Oakland dure deux matchs. Peu après, Jean Cusson prend le chemin de la Suisse, où sa carrière professionnelle durera 15 ans.

De retour au pays, il ouvre un premier magasin avec ses deux frères en 1986. L'un d'entre eux tient un restaurant et un fournisseur lui a confié que les ventes de saucisses sont excellentes en été.

Mais les débuts sont difficiles pour la jeune entreprise. M. Cusson a beau avoir vécu 15 ans en Suisse, il ne connaît pas grand-chose à la confection des saucisses. Son instinct le pousse à ouvrir son commerce dans la Plaza Côte-des-Neiges, dans un secteur où l'on trouve une forte population immigrante.

«Notre première erreur a été de s'installer là, raconte l'entrepreneur. On croyait à l'époque que des Européens allaient acheter des saucisses.»

Les trois frères s'endettent jusqu'au cou pour acheter l'équipement pour fabriquer les saucisses. Alors qu'ils frôlent la faillite, leur associé chargé de la création des aliments les largue. Des employés qu'ils embauchent pour le remplacer menacent de faire la grève si leur salaire n'est pas augmenté.

Malgré la tempête, les Cusson décident d'ouvrir une deuxième succursale, cette fois aux Halles d'Anjou. Ils mettent au point de nouvelles variétés de saucisses et organisent des dégustations pour attirer des clients. C'est finalement l'été, la saison du barbecue, qui récompensera leurs efforts.

«On s'est rendu compte que les Italiens vont dans des boutiques italiennes, les Arabes vont dans des boutiques arabes, les Grecs vont dans des boutiques grecques, explique Jean Cusson. On a réalisé que notre clientèle est francophone.»

Expansion

Dès lors, les entrepreneurs ferment la boutique de Côte-des-Neiges et dénichent un nouveau local dans le Marché 440, à Laval. Ils délèguent la production de saucisses à deux sous-traitants pour se concentrer exclusivement sur la vente.

Des clients, impressionnés par le produit, parlent aux Cusson pour ouvrir des franchises à leur tour. On leur demande de verser une somme d'argent pour utiliser la bannière, et on leur demande d'acheter exclusivement des saucisses approuvées par la société mère. Mais dans l'ensemble, les franchisés ont carte blanche.

«La différence avec les autres chaînes, c'est qu'on permet à nos franchisés de vendre autre chose que de la saucisse, dit Jean Cusson. Ceux qui sont avec nous doivent être des entrepreneurs. Certains vendent du fromage, des bières importées, des pâtes, mais c'est un domaine dont on ne s'occupe pas.»

Aujourd'hui âgé de 68 ans, Jean Cusson commence à songer à la retraite. Il léguera une entreprise florissante à ses fils: une quinzaine de succursales dans le Grand Montréal, d'autres dans les Laurentides, dans Lanaudière, en Montérégie, et même à Sherbrooke. Les deux derniers-nés de la chaîne ont récemment ouvert leurs portes à Gatineau. La chaîne pourrait bientôt s'étendre au Saguenay et à Québec.