Les consommateurs canadiens ne devraient pas trop sursauter devant les tablettes d'épicerie dans les prochaines années. La hausse des prix des aliments devrait être beaucoup plus modérée que dans les dernières années, selon les experts qu'a consultés La Presse Affaires.

La semaine dernière, un rapport de l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) et de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a laissé voir des hausses des prix de la plupart des denrées agricoles dans la prochaine décennie, par rapport aux prix de 1997-2006. Mais les prix de ces denrées devraient rester en deçà des sommets atteints entre 2007 et 2009, qui s'étaient largement répercutés en épicerie.

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Les prix ont reculé depuis, et rien ne laisse entrevoir une nouvelle flambée pour l'instant. Les agriculteurs ont augmenté la production de céréales et les inventaires américains, entre autres, sont très élevés.

Au Canada, la parité anticipée avec le dollar américain devrait augmenter le pouvoir d'achat des consommateurs canadiens pour les produits importés, par exemple les fruits et légumes du sud des États-Unis. «Cela pourrait limiter les hausses de prix, voire les pousser à la baisse», soutient Sébastien Lavoie, économiste à la Banque Laurentienne.

La vive compétition entre les détaillants, dont les Costco et Wal-Mart de ce monde, aide aussi à contenir les prix, observe Kenrick Jordan, économiste principal chez BMO Marchés des capitaux.

Mais le prix des aliments est une variable sensible.

À long terme, la marée noire dans le golfe du Mexique pourrait avoir un impact sur les tablettes des épiceries canadiennes, soutient Sylvain Charlebois, vice-doyen de l'École supérieure d'études en politique publique Johnson-Shoyama, affiliée aux universités de Regina et de Saskatchewan.

Aucun produit ne goûtera le pétrole, mais les risques liés à l'exploitation extracôtière d'hydrocarbures pourraient ramener l'éthanol dans les bonnes grâces des Américains. Et l'utilisation de terres agricoles réservées à la production d'éthanol ferait grimper de nouveau le prix des céréales. Et voilà que le prix sur l'étiquette de votre pain préféré gagnerait quelques sous.

En fait, toute hausse des prix du pétrole, en plus d'augmenter les coûts des agriculteurs, jouera en faveur des biocarburants, y compris l'éthanol.

La hausse des salaires dans les pays émergents soutiendra également les prix mondiaux, note Sébastien Lavoie. Un plus haut salaire, donc un peu plus de viande au menu. Si la demande pour la viande grimpe, il faut davantage de grain pour produire la viande. Les prix montent.

Au final, entre pressions à la hausse et pressions à la baisse, tant Sébastien Lavoie que Kenrick Jordan prévoient une croissance des prix canadiens légèrement sous l'inflation générale dans les années à venir. Selon M. Jordan, de BMO, il est question d'une progression de 1,5% cette année (la plus faible depuis la fin des années 90), et de 2% l'an prochain.

C'est loin des bonds de 3,5% en 2008 et de 4,9% en 2009, des chiffres qu'on n'anticipe pas revoir de sitôt. Même si nous ne sommes jamais vraiment à l'abri d'une hausse soudaine et brutale des prix, rappellent les experts.