Sobeys et ses supermarchés IGA viennent de conclure une entente avec huit fromagers artisans du Québec. Les détaillants vendront, en exclusivité, leurs fromages dans les 263 épiceries du groupe. Comme chacun des fromagers ne peut pas fournir autant de comptoirs, les produits seront présentés en groupe. Ce qui permet à des plus petits producteurs de percer le marché de la grande distribution, sur l'ensemble du territoire québécois.

Si une semaine, il n'y a plus de Tomme de Monsieur Séguin, le consommateur pourra se tourner vers Le Voyageur, un fromage de lait de vache à croûte lavée, fait spécialement pour le projet IGA, par la Fromagerie Le P'tit train du Nord.

«Nous avons 33 têtes et nous n'avons pas l'intention d'augmenter notre production», a dit Louis Arsenault, de la Fromagerie des Grondines, qui vendra chez IGA son fromage bio au lait cru éponyme.

Toutes les entreprises participantes ne sont pas aussi petites. Certaines sont de catégorie «moyenne», loin des grandes industries laitières, mais tout de même assez grosses pour avoir déjà un bon réseau de distribution, comme la fromagerie Kaiser, de la Montérégie, ou la maison d'affinage Maurice Dufour, de Charlevoix, à qui l'on doit le Migneron.

Chez IGA, la fromagerie proposera sa nouvelle Tomme de brebis, de Charlevoix. La plupart des IGA du Québec étant la propriété de marchands indépendants, 250 sur 263, les épiceries auront aussi le loisir de faire plus de place aux produits de leurs régions.

Sobeys estime avoir investi 250 000$ pour le marketing et l'approvisionnement des fromages. Le groupe a aussi laissé tomber les frais de «listing» pour ces nouveaux arrivants, ces frais qui sont exigés aux fournisseurs pour avoir accès aux tablettes des supermarchés, et fera la promotion de ces nouveaux produits du terroir. La bannière étant canadienne, on pourrait même voir un événement fromage du Québec sur la côte Ouest.

Le plan comprend aussi des dégustations en magasin, faites par les fromagers eux-mêmes.

«Pour nous, il s'agit aussi d'un avantage concurrentiel», admet Marc Poulin, président de Sobeys Québec. Le but étant de combler les désirs des clients gourmets, afin qu'ils n'aient plus à passer à la fromagerie après avoir fait l'épicerie.

Et que diront les autres fabricants de fromages, qui ont une gamme de spécialités, de voir ainsi des concurrents avoir droit au tapis rouge?

Saputo travaille fort depuis des années pour développer l'image de ses fromages de spécialité, notamment sous sa marque Alexis-de-Portneuf, dont le fromage Cendrillon vient de remporter le titre de Meilleur fromage du monde. «La tarte est assez grande pour tout le monde», estime Marc Poulin, qui explique qu'un fromage comme le Cendrillon, parce qu'il est produit en grande quantité, jouit déjà d'une bonne visibilité dans les comptoirs et les circulaires. Ce qui était impossible de faire avec des produits de petits artisans qui ne peuvent pas offrir un volume et un approvisionnement constant.