Un signe de plus que la reprise économique se déroule à rythme différent selon le côté de la frontière où on se trouve: les ventes de Quincaillerie Richelieu (T.RCH), dévoilées hier, sont en forte hausse au Canada, mais en arrachent encore du côté américain.

Ainsi, les ventes canadiennes ont progressé de 10% au cours du trimestre terminé le 28 février, pour s'établir à 81,2 millions de dollars. Aux États-Unis, elles ont pris le chemin inverse: une diminution de 9,2%, qui atteint même les 13,6% si on exclut les acquisitions faites pendant l'année.

«Aux États-Unis, les signes de reprise ne sont pas encore évidents», a confié le président et chef de la direction, Richard Lord, aux actionnaires réunis en assemblée.

Difficultés aux États-Unis

En entrevue, il s'est fait un peu plus précis. «On sent que ça descend moins vite. On pense que ça se stabilisera dans les semaines ou mois à venir. Et après, on espère que ça repartira vers une amélioration du marché.»

Benoît Caron, analyste de la Financière Banque Nationale, a été surpris par la vigueur canadienne, mais pas par les difficultés américaines. «Tu as des gens qui attendent de voir s'ils ont encore un emploi avant de rénover leur cuisine.»

Et il cite des chiffres sur les livraisons de cuisines aux États-Unis: elles étaient en baisse de 34,2% en janvier 2009, comparativement à une baisse de 6% cette année. «Au moins, on arrête de s'engouffrer.»

M. Caron s'apprêtait hier à augmenter son prix cible du titre. Il était à 23,50$ avant la mise à jour d'hier soir.

Les ventes canadiennes ont été particulièrement bonnes au Québec, dans les Maritimes (+10%) et en Ontario (+15%).

L'analyste soupçonne que les crédits d'impôt pour la rénovation y sont pour quelque chose. Ils ont pris fin pendant le premier trimestre de Richelieu.

«On me dit que ça n'a pas un impact significatif sur nos ventes actuellement, soutient pour sa part M. Lord. Ce qu'on peut voir, c'est que nos clients ont des commandes pour plusieurs mois à l'avance, donc, bien après la fin des programmes de rénovation.»

Un bénéfice en forte hausse

«Ce qui me plaît le plus, c'est vraiment les marges (bénéficiaires)», souligne quant à lui Leon Aghazarian, de Valeurs mobilières Industrielle Alliance. Elles sont de retour au niveau de 2008, ajoute-t-il.

Cela a eu pour effet de gonfler le bénéfice net de 61%, à 7 millions de dollars. «Ils ont été plus profitables que je pensais», admet-il.

«Je ne me rappelle pas d'avoir vu Richard Lord aussi bullish que ça», commente Benoît Caron.

Nouveaux produits

En entrevue, le patron semble en effet emballé par ses nouveaux produits. «Qui aménageait ses garde-robes il y a 10 ans? Maintenant, tout le monde le fait. Puis moi, je peux vous dire que ça augmente le degré de bonheur à la maison, surtout pour un homme, d'avoir des garde-robes éclairés où tout est bien placé.»

L'analyste de la Financière Banque Nationale apprécie particulièrement le ménage effectué par Richelieu pendant la dernière année. «Ils ont optimisé leurs façons de faire», dit-il.

Ainsi, une centaine d'emplois (sur les 1200 qui restent) sont disparus. Les stocks ont aussi été réduits.

Même un secteur a été abandonné, celui de la céramique. «On ne faisait pas d'argent avec ça», explique le chef de la direction, Alain Giasson, qui se félicite d'avoir au passage réalisé un gain après impôt de 700 000$ dans la liquidation.

Fait à noter, les cadres de Richelieu ont vu leur salaire gelé en 2009. Avec la reprise vient le dégel. Mais pas pour Richard Lord, qui s'est engagé à garder le même salaire pendant deux ans.

L'an dernier, sa rémunération totale a atteint 1,19 million, comparativement à 1,39 million un an plus tôt.

Hier, le titre de Richelieu a atteint en séance un sommet annuel de 23,50$. Il a fini la journée à 23,40$, en hausse de 54 cents ou 2,4%.

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