Beaucoup de travail reste à faire au cours des discussions de haut niveau qui ont repris mercredi à Washington entre le Canada et les États-Unis sur la refonte de l'accord de libre-échange nord-américain (ALENA).

Il reste «encore du travail» à accomplir pour les négociateurs, a déclaré à Ottawa le premier ministre canadien Justin Trudeau, qui a envoyé de nouveau sa ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland négocier à Washington avec le représentant américain au commerce Robert Lighthizer (USTR), pour la première session de discussions en personne depuis huit jours.

«On reste confiants (sur le fait) qu'il y a toujours une piste (d'accord) mais ça va encore demander du travail», a déclaré le dirigeant libéral qui s'est entretenu mardi soir avec Donald Trump en réaffirmant son «engagement à conclure un accord avantageux pour les deux pays».

À Washington, Mme Freeland a souligné «l'intensité» des sessions pendant toute la semaine écoulée et même la nuit dernière. «Une équipe a travaillé pendant toute la nuit jusqu'à sept heures du matin», a indiqué la ministre à la presse avant d'entrer dans les locaux de l'USTR.

Mais comme à son habitude, elle s'est gardée de donner des détails sur l'évolution des négociations qui durent maintenant depuis plusieurs semaines.

Elle a indiqué aux journalistes s'être entretenue à Washington avec le premier ministre de l'Ontario Doug Ford, venu lui-même aux États-Unis pour rencontrer les négociateurs américains. Le message de cet élu conservateur qui, sur le dossier ALENA, soutient le gouvernement libéral de M. Trudeau, peut se résumer ainsi, selon les médias canadiens: «Ne faites pas de compromis, car nous devons protéger nos agriculteurs».

«Gardez votre calme et négociez»

En quittant le Canada pour Washington, la chef de la diplomatie canadienne portait un T-shirt faisant référence aux négociations, estampillé: «Gardez votre calme et négociez l'ALENA».

«C'est un cadeau de ses enfants. Elle le porte tout le temps», a confirmé son porte-parole Adam Austen.

Le message est un énième détournement humoristique d'un slogan placardé sur des affiches par le gouvernement britannique en 1939, «Keep calm and carry on» («Gardez votre calme et continuez») pour préparer la population à d'éventuelles attaques aériennes allemandes au début de la Seconde Guerre mondiale.

Les médias canadiens ont immédiatement vu dans ce T-shirt le message que le Canada n'était pas prêt à céder aux pressions de l'administration Trump.

La renégociation de l'accord de libre-échange, qui lie depuis 1994 les économies américaine, canadienne et mexicaine, a été imposée en août 2017 par le président américain Donald Trump. Il considère ce traité comme «le pire» de l'histoire pour avoir détruit des emplois américains, notamment dans le secteur automobile.

Les États-Unis ont déjà signé en août un pan bilatéral du traité de libre-échange avec le Mexique.

Les discussions entre Ottawa et Washington achoppent notamment sur la protection du secteur laitier canadien et sur le dispositif de règlement des litiges commerciaux (dit chapitre 19), tous deux remis en question par l'administration Trump.

«On va continuer de défendre la gestion de l'offre» agricole, a assuré M. Trudeau, alors que Donald Trump s'est de nouveau insurgé mardi contre les clauses protectionnistes protégeant le secteur laitier canadien.

Décidés à ne pas faire les frais d'un compromis entre Washington et Ottawa, qui tentent de s'entendre sur une version modernisée de l'ALENA après plus d'un an de négociations, les producteurs laitiers canadiens ont d'ailleurs accru la pression mercredi sur le gouvernement de M. Trudeau.

«Nous demandons au gouvernement de veiller à ce que tout accord définitif de l'ALENA n'ait aucun impact négatif additionnel sur le secteur laitier», a déclaré à Ottawa Pierre Lampron, président de l'association des producteurs laitiers du Canada.

Mercredi, la ministre des Affaires étrangères a assuré que le Canada avait un «talent» pour les négociations. «Nous sommes un pays qui est bon pour trouver des compromis. C'est un talent que nos négociateurs démontrent de façon certaine», a indiqué la ministre en ajoutant que l'objectif principal «restait de défendre l'objectif national» canadien.