L'entreprise montréalaise GHGSat, qui a lancé il y a deux ans le microsatellite Claire mesurant les émissions de gaz à effet de serre, sera parmi les quatre premières entreprises canadiennes à profiter du fonds de 700 millions de dollars annoncé en janvier dernier par Ottawa.

La Banque de développement du Canada (BDC), qui gère ce fonds, annoncera ce matin qu'une première enveloppe de 40 millions sera octroyée à quatre entreprises spécialisées en technologies propres. Les sommes spécifiques accordées à chacune n'ont pas été dévoilées, « mais on s'attend à ce que les investissements tournent autour de la dizaine de millions », précise en entrevue François Lecavalier, premier vice-président, développement corporatif, à la BDC.

MUNITIONS POUR L'EXPORTATION

Ce fonds de 700 millions sur cinq ans fait partie des investissements de 2,3 milliards dans les technologies propres annoncés par le gouvernement Trudeau dans son budget déposé en mars 2017. Une centaine d'entreprises ont déposé une demande pour en profiter.

« L'objectif fondamental est d'aider les entreprises canadiennes à croître, leur donner les munitions nécessaires, notamment pour aller à l'international, dit M. Lecavalier. Quand on parle de technologies propres, on ne parle pas que du marché canadien, mais de la Chine, de l'Inde, de l'Afrique. »

GHGSat, une entreprise fondée à Pointe-Claire qui a maintenant son quartier général à l'angle du boulevard Saint-Laurent et de la rue Duluth, a développé à partir de 2013 un petit satellite de moins de 15 kg baptisé Claire. Sa spécialité, c'est de mesurer avec une précision inégalée à partir de l'espace, et à faible coût, les concentrations de deux gaz à effet de serre, le CO2 et le méthane.

« Il n'y a pas de débat au niveau global sur les concentrations de GES. Nous, ce qu'on essaie de faire, c'est aider les opérateurs industriels qui doivent rapporter leurs émissions à un niveau beaucoup plus détaillé. »

- Stéphane Germain, PDG de GHGSat

BIENTÔT TROIS SATELLITES

Lancé en juin 2016, le microsatellite Claire mesure les émissions de GES des différentes industries à travers le monde qui font appel aux services de GHGSat. Les entreprises sont de plus en plus assujetties à des plafonds et des systèmes d'échange qui les obligent à un décompte plus précis de leurs émissions, explique M. Germain. « C'est un marché en pleine effervescence. Ça fait de belles opportunités d'affaires, et on est très bien positionnés puisqu'on a été les premiers à le faire. »

Un deuxième satellite, au nom pour l'instant peu poétique de GHGSat-C1, est en construction et son lancement est prévu au début de 2019. L'investissement qui sera annoncé ce matin par la BDC servira à la construction d'un troisième satellite et au développement de marchés à l'international.

GHGSat emploie présentement 14 personnes, essentiellement aux activités de recherche et de traitement des données, la construction étant confiée à des sous-traitants à Pointe-Claire et à Toronto. On prévoit atteindre les 40 employés d'ici deux ans. À terme, on espère mettre en orbite une flotte d'une vingtaine de satellites.

Du côté de la BDC, on espère annoncer des investissements en technologies propres totalisant de « 100 à 200 millions » d'ici le 31 mars 2019, précise François Lecavalier. « Bien qu'on soit prêt à prendre plus de risques dans ce domaine, on a quand même un processus d'investissement très rigoureux. Il va y avoir beaucoup d'appelés, mais peu d'élus. »

LES TECHNOLOGIES PROPRES AU CANADA

13,7 MILLIARDS

Revenus en 2015, dont la moitié proviennent des exportations

3,1 % 

Proportion du PIB en 2016 (59,3 milliards)

43 % 

Proportion des activités en technologies propres proviennent de l'électricité propre, suivie de la gestion des déchets (12 %)

274 000 

Nombre d'emplois

Sources : Écotech Québec, Statistique Canada, gouvernement du Canada, Analytica Advisors

Photo fournie par GHGSat

Lancé en juin 2016, le microsatellite Claire mesure les émissions de GES des différentes industries à travers le monde qui font appel aux services de GHGSat.

LES TROIS AUTRES ENTREPRISES CHOISIES

ENSYN (OTTAWA)

Depuis 1984, cette entreprise ontarienne produit du biocarburant, notamment du mazout renouvelable, à partir de résidus forestiers. Elle a entamé l'an dernier la construction d'une usine à Port-Cartier, sur la Côte-Nord, pour laquelle on prévoit une production de 40 millions de litres par année.

GREENMANTRA (BRANTFORD)

Fondée en 2010, GreenMantra se décrit comme « la seule entreprise au monde » transformant le plastique recyclé en produits chimiques de haute valeur. Les polymères ainsi obtenus sont utilisés pour de la cire, des graisses ou des lubrifiants. Un des principaux débouchés, ce sont les bardeaux utilisés pour les toitures.

ENLIGHTEN (CALGARY)

Anciennement connue sous le nom de Field Upgrading, cette entreprise albertaine exploite une technologie utilisant un sodium pour réduire les polluants, notamment le soufre, présents dans le pétrole lourd. Fait à noter, la PDG de cette entreprise, Lorraine Mitchelmore, a été présidente de Shell Canada de 2009 à 2016.