L'égalité des chances entre les hommes et les femmes dans la sphère économique se trouvera au coeur du budget fédéral présenté demain par Bill Morneau. Plusieurs autres dossiers chauds seront à suivre, comme la taille du déficit, le plan d'aide aux médias écrits ou encore les mesures fiscales destinées aux PME. Tour d'horizon de huit éléments-clés.

1. Égalité hommes-femmes

Après avoir fait de l'amélioration du sort de la classe moyenne la pierre angulaire de ses politiques budgétaires depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement Trudeau compte maintenant s'attaquer à la question de l'égalité entre les hommes et les femmes dans son troisième budget. Depuis quelques mois, le premier ministre fait de cette question, qui devrait être le fil conducteur du budget, une véritable obsession. Cela a d'ailleurs constitué l'essentiel du message qu'il a livré durant son discours au Forum économique mondial à Davos, le mois dernier. Et cette question est l'un des thèmes retenus par le Canada à l'occasion du sommet du G7, en juin, dans la région de Charlevoix. Certaines des mesures viseront à assurer l'équité salariale entre les hommes et les femmes, notamment au sein de l'appareil gouvernemental et dans les entreprises qui sont réglementées par le gouvernement fédéral.

2. Investissements dans la recherche fondamentale

Après avoir annoncé des investissements pour créer cinq supergrappes au pays qui pourront stimuler l'innovation, le gouvernement Trudeau entend annoncer des investissements dans la recherche fondamentale. Les mesures annoncées pourraient s'inspirer des recommandations contenues dans le rapport rédigé par l'ancien président de l'Université de Toronto David Naylor, dévoilé en 2017. Dans ce rapport, on recommandait des investissements de 1,3 milliard de dollars supplémentaires sur quatre ans pour financer divers projets de recherche.

3. Taille du déficit

Dans son énoncé économique de l'automne dernier, le ministre des Finances a dit s'attendre à un déficit moindre que prévu pendant la prochaine année financière, soit 18,6 milliards de dollars. D'ici 2023, les déficits fédéraux devraient totaliser près de 100 milliards. Malgré cette somme considérable, Bill Morneau s'est voulu rassurant, soulignant que le poids de la dette par rapport au produit intérieur brut devrait descendre de 31,2 % aujourd'hui à 28,5 % en 2022-2023, soit le niveau le plus bas en quatre décennies.

4. Plan de retour à l'équilibre ?

L'économie canadienne connaît une période faste depuis deux ans, comme en témoignent les recettes fiscales plus importantes que prévu du gouvernement. L'opposition s'inquiète néanmoins de l'absence d'un plan de retour à l'équilibre budgétaire, d'autant plus que l'élan de croissance montre certains signes d'essoufflement. Le député conservateur Pierre Poilievre a récemment demandé à Ottawa de respecter sa promesse électorale, qui était de limiter les déficits à 10 milliards et de revenir à l'équilibre budgétaire d'ici 2019. Bill Morneau respectera-t-il cette promesse de campagne ?

5. Contrôle des dépenses

La façon dont Ottawa contrôlera - ou pas - ses dépenses sera justement un point majeur à suivre demain, note Sean Speer, chercheur senior à l'Institut Macdonald-Laurier. Alors que les dépenses gouvernementales ont grimpé en moyenne de 6,4 % depuis deux ans, elles devraient croître de seulement 2,3 % d'ici la fin du mandat de Justin Trudeau en 2019 selon les prévisions actuelles. « Mais Ottawa n'a pas fourni beaucoup d'explications sur la façon dont la croissance des dépenses de programmes sera réduite de plus de la moitié, a-t-il observé. Les Canadiens ont raison d'être sceptiques, surtout à la lumière des tendances historiques [de dépenses] à l'approche d'élections. »

6. Réforme fiscale

Les petites et moyennes entreprises (PME) attendent le budget Morneau avec une bonne dose d'incertitude. Dans une lettre envoyée au ministre la semaine dernière, elles ont exigé davantage d'équité fiscale et des précisions sur les modifications fiscales proposées par Ottawa. Les changements proposés aux règles sur les placements passifs, par exemple, pourraient limiter la capacité des entrepreneurs à économiser en vue de faire des investissements, a fait valoir la Coalition pour l'équité fiscale envers les PME. Des réponses sont espérées demain.

7. Concurrence avec les États-Unis

Les baisses d'impôts draconiennes adoptées aux États-Unis par l'administration Trump font aussi peur au secteur manufacturier canadien. Dennis Darby, président de Manufacturiers et Exportateurs du Canada, note que les investissements pour de nouveaux projets d'usine ont chuté de 40 % au Canada depuis une décennie, alors qu'ils ont grimpé de 41 % au sud de la frontière. Une tendance qui risque de s'accélérer grâce aux baisses d'impôts de Trump. Alors que l'incertitude est plus grande que jamais au sujet de l'ALENA, M. Darby demande à Ottawa une série de mesures pour accroître la compétitivité du Canada, incluant une baisse du taux d'impôt combiné des entreprises à 20 %.

8. Aide aux médias

Le secteur de la presse écrite vit des jours de plus en plus sombres au pays, comme en témoigne l'aveu récent de l'éditeur du Toronto Star, qui a indiqué que son journal se battait pour sa survie. Des mesures d'aide seront annoncées demain, principalement une bonification du Fonds du Canada pour les périodiques, dont les ressources seront augmentées pour permettre une transition vers le numérique des publications locales. Le Devoir et le Toronto Star ont rapporté en fin de semaine qu'Ottawa proposerait aussi une aide de 50 millions sur cinq ans pour les médias locaux. Il n'y aura toutefois aucun « sauvetage » pour les quotidiens nationaux, selon nos informations. L'idée de donner un crédit d'impôt sur la masse salariale des salles de presse, à l'image de ce qui existe dans l'industrie du jeu vidéo, a été jugée trop coûteuse et écartée. La ministre du Patrimoine canadien Mélanie Joly ne veut pas soutenir des modèles d'affaires non viables, fait-on valoir. Elle souhaite aussi un plan qui respectera l'indépendance des salles de presse.