Le patron de la Banque du Canada a indiqué mercredi qu'une réduction des taux d'intérêt n'était pas dans les cartes, mais il a aussi lancé un avertissement au sujet de certains risques persistants, qui lui font croire qu'une hausse des taux n'est pas imminente non plus.

La banque centrale a laissé son taux d'intérêt directeur inchangé mercredi, malgré la récente publication d'une série d'indicateurs économiques supérieurs aux attentes pour les premiers mois de 2017.

«En tenant compte des chiffres que nous avons vus ces derniers mois, je peux assez clairement affirmer «Non, une baisse des taux n'est pas envisagée pour l'instant'», a expliqué le gouverneur de la banque, Stephen Poloz, lors d'une conférence de presse à Ottawa.

«Comme nous l'avons souligné, de façon assez franche je crois, en vertu des circonstances que nous observons, nous sommes résolument neutres.»

En janvier, M. Poloz avait laissé la porte ouverte à une éventuelle baisse des taux, évoquant l'incertitude entourant le programme commercial des États-Unis et la relative stabilité de l'économie canadienne. Mais avec la récente série de solides données, la banque a reconnu mercredi qu'il y avait eu des améliorations.

La Banque du Canada table maintenant sur une croissance annuelle du produit intérieur brut (PIB) de 2,6 % pour 2017, alors qu'elle visait en janvier une croissance de 2,1 %.

Ce changement dans les prévisions de la banque centrale laisse aussi croire qu'une hausse des taux pourrait survenir plus rapidement que ne le prévoyait le marché plus tôt cette année. L'élan positif dont jouit l'économie a convaincu la Banque du Canada de rapprocher la date d'un retour à une pleine capacité pour l'économie canadienne -elle s'attend désormais à ce que cela se produise tôt l'an prochain.

«Les données ont été bonnes pour les quelques derniers mois et nous en sommes ravis», a expliqué M. Poloz. «C'est bien mieux que de devoir jongler avec des déceptions.»

Mais la banque n'a pas manqué d'insister sur les risques à la baisse qui menacent toujours l'économie, notamment en ce qui a trait à l'incertitude aux États-Unis.

En maintenant son taux directeur à 0,5 %, elle a indiqué que les effets potentiellement négatifs des décisions économiques qui seront prises aux États-Unis continuaient de peser sur ses perspectives.

Elle a en outre estimé que l'économie devait toujours prouver qu'elle pouvait garder son rythme de croisière actuel.

La récente amélioration, a poursuivi la banque, était largement alimentée par la robustesse inattendue des investissements résidentiels, ainsi que par des facteurs temporaires comme la reprise des dépenses dans le secteur de l'énergie et la hausse des dépenses des consommateurs grâce aux allocations pour les enfants du gouvernement.

La croissance des exportations était inégale, a noté la Banque du Canada, en insistant sur certains signes de faiblesse dans des secteurs comme les investissements des entreprises et dans des indicateurs sous-jacents de l'emploi comme le nombre d'heures travaillées et les salaires.

Pour les années qui suivront 2017, la banque centrale a prédit une croissance plus modérée et mieux équilibrée. Elle s'attend à une meilleure contribution de la part des exportations et des investissements d'entreprises. La forte cadence des dépenses des consommateurs, particulièrement au chapitre des investissements résidentiels, devrait éventuellement ralentir l'an prochain, alors que grimperont les taux d'endettement et les coûts de l'emprunt.

Mais cette année, la vigueur de certains marchés de l'habitation, comme celui de Toronto, permettra à l'investissement résidentiel de livrer une contribution «significativement plus élevée» à la performance canadienne que la banque ne l'avait prévu en janvier. Elle en a aussi profité pour noter que la hausse des prix de l'immobilier dans la région de Toronto semblait être attribuable, en partie, à la spéculation.

La croissance économique devrait s'établir à 1,9 % en 2018, a calculé la Banque du Canada, une prévision en baisse par rapport à celle de 2,1 % faite en janvier. Elle devrait ensuite ralentir de nouveau à 1,8 % en 2019.

Dans son rapport trimestriel sur la politique monétaire, qu'elle a aussi dévoilé mercredi, la banque centrale a expliqué que ses perspectives tenaient compte, dans une certaine mesure, de l'incertitude entourant d'éventuels changements aux États-Unis, particulièrement en ce qui a trait aux politiques commerciales et fiscales.

Puisque l'échéancier de ces éventuels changements est inconnu, la banque a expliqué que ses prévisions tenaient uniquement compte de l'incidence estimative d'une «incertitude élevée et persistante liée aux politiques de commerce extérieur sur les échanges et les investissements au pays et dans le monde».