En pleine période des impôts, l'Agence du revenu du Canada (ARC) fait de la «propagande conservatrice» dans une lettre envoyée aux parents du pays, accuse l'opposition à Ottawa.

L'agence fédérale a acheminé au cours des derniers jours des enveloppes contenant trois pages d'information sur les mesures fiscales mises de l'avant par les conservateurs, dont le fractionnement du revenu et les bonifications au régime de prestation universelle pour la garde d'enfants (PUGE).

«Cette année, le gouvernement du Canada a introduit un certain nombre de réductions d'impôt et de prestations pour les familles, qui aideront à rendre la vie plus abordable», est-il écrit dans la lettre.

«Votre famille bénéficiera directement des nouvelles réductions d'impôt et prestations», peut-on aussi y lire.

Or, non seulement ces mesures n'ont-elles pas été adoptées au Parlement - ce qui est précisé dans la lettre dans le cas de la PUGE -, mais en plus, elles sont présentées de façon partisane, dénonce l'opposition.

En prenant connaissance des documents fournis par La Presse Canadienne, le porte-parole adjoint du Nouveau Parti démocratique en matière de finances, Guy Caron, s'est montré désolé que l'agence gouvernementale se fasse ainsi «le porte-voix» du Parti conservateur.

«C'est vraiment une lettre qui donne le côté, ou l'angle, conservateur, alors dans ce sens-là, je le considère comme étant de la propagande même si ça vient de l'ARC», a-t-il affirmé en entrevue téléphonique.

Le contenu et le ton de la lettre déplaisent également au porte-parole libéral en matière de finances, Scott Brison, qui parle d'une «attaque contre l'indépendance» des services publics que sont censés offrir les fonctionnaires fédéraux à la population canadienne.

«Il est inapproprié de la part du gouvernement conservateur d'utiliser les ministères importants comme l'ARC pour promouvoir leurs mesures conservatrices, particulièrement avant un budget», a-t-il martelé en entrevue téléphonique.

Mais cette tactique est typique du Parti conservateur, qui est prêt à dépenser 7,5 millions $ de fonds publics pour faire la promotion de son budget, a ironisé M. Brison à l'autre bout du fil.

Le gouvernement conservateur se défend catégoriquement d'instrumentaliser l'agence pour servir ses propres intérêts.

«L'ARC n'agit pas d'une manière partisane», a écrit dans un courriel Rebecca Rogers, la directrice des communications de la ministre du Revenu national, Kerry-Lynne Findlay.

La porte-parole assure également qu'il est tout à fait normal pour l'agence de présenter des mesures législatives n'ayant pas encore été approuvées par le Parlement.

«Selon une pratique bien établie, l'ARC exécute une loi proposée en demandant aux particuliers de produire leurs déclarations, qui font ensuite l'objet d'une cotisation en fonction des changements proposés», a précisé Mme Rogers.

«Cette pratique a pour but d'éviter la confusion du public et d'améliorer l'efficacité administrative», a-t-elle ajouté.

Le premier ministre Stephen Harper a annoncé le 30 octobre dernier les mesures que son gouvernement comptait mettre en oeuvre pour réduire le fardeau fiscal des familles ayant des enfants âgés de moins de 18 ans.

Le Directeur parlementaire du budget (DPB) a publié des rapports critiquant les deux principaux volets de ce plan.

Le fractionnement du revenu a été jugé «régressif», dans la mesure où il ne profite qu'à un faible pourcentage de ménages - deux millions de familles canadiennes, soit 15 pour cent d'entre elles, a indiqué le DPB.

Quant à l'instauration d'une nouvelle PUGE mensuelle de 60 $ pour les enfants âgés de six à 17 ans, elle a peu à voir avec la garde d'enfants, puisque les besoins des adolescents en cette matière ne sont pas véritablement présents, a fait remarquer le DPB dans un second rapport.