Les manufacturiers du Québec sont les premiers à se réjouir de la dépréciation du dollar canadien depuis le 19 juin. Ceux-ci devraient en profiter pour augmenter leurs livraisons aux États-Unis, d'autant que l'économie de nos voisins du Sud prend du mieux.

«En même temps que le dollar diminue, l'économie américaine reprend. Le timing est excellent, dit Pierre Cléroux, économiste en chef et vice-président de la recherche à la Banque de développement du Canada (BDC). Ça va donner des opportunités à nos exportateurs.»

Selon lui, le secteur des produits du bois, industrie d'importance au Québec, devrait profiter de la reprise du secteur de l'habitation aux États-Unis. Des producteurs de bois d'oeuvre, des fabricants de planchers et de meubles sont tous susceptibles de profiter de l'embellie.

«Pour l'industrie, ça crée un contexte plus favorable, dit au sujet de la baisse du huard Steve St-Gelais, président de Boisaco, un fabricant de bois d'oeuvre situé à Sacré-Coeur, au Saguenay. On bonifie nos revenus quand on vend aux États-Unis.»

Bien que l'entreprise vende presque exclusivement au Canada, Boisaco tirera profit d'une baisse durable du dollar canadien par son impact à la hausse sur les prix pratiqués au Canada, d'expliquer M. St-Gelais.

La production des produits du bois s'est améliorée au Québec en 2012, mais reste à environ 60% du niveau des années 2002 à 2004. Les prix prennent du mieux depuis leur creux de 2011, à 306,22$ par pied mesure de planche (pmp). Actuellement, l'indice Pribec est à 370,09$/pmp, en hausse de 21%.

Impact positif sur le PIB dès cette année

Les économistes consultés s'accordent pour dire que, de façon générale, une baisse du dollar canadien est bonne pour le Québec et l'Ontario, le coeur manufacturier du pays.

Selon un récent sondage commandé par Exportation et développement Canada, 91% des exportateurs au pays se disaient modérément préparés ou très bien préparés à affronter les marchés internationaux avec un dollar canadien à parité.

«Dès que le taux de change glisse sous la parité, c'est un boni pour les exportateurs», dit Peter Hall, économiste en chef d'EDC.

M. Hall a calculé que la baisse du dollar, si elle se maintient, ajoutera 50 points de base au PIB du Québec en deuxième moitié d'année et 50 points additionnels en 2014. En 2015, si le dollar reste à 0,95$US, l'impact deviendra toutefois marginal.

Outre le bois, l'aéronautique, les pièces d'autos et les technologies réagissent fortement à une variation de la valeur de la monnaie canadienne, soutient M. Hall.

Même pour les manufacturiers qui exportent peu ou pas, la dévaluation de la monnaie locale est bénéfique, car elle rend les importations plus coûteuses, donc moins concurrentielles sur les marchés locaux. Le secteur de l'alimentation pourrait en profiter, croit M. Cléroux, de la BDC.

Les Américains nous auront-ils oubliés?

Pour d'autres économistes, l'impact positif ou négatif d'une baisse du dollar est plus nuancé. «Ce n'est pas noir ou blanc. Pour quelques sous, l'effet ne sera pas dramatique, surtout à court terme», dit Joëlle Noreau, économiste principale au Mouvement Desjardins.

La concurrence s'est de plus intensifiée sur les marchés internationaux, et les Canadiens devront travailler fort, dit-elle, pour regagner la confiance des acheteurs américains qui ont oublié leur existence à la suite de l'envolée du huard à compter de 2003. Par ailleurs, une baisse du dollar canadien se traduit par une hausse des coûts de production chez les manufacturiers qui importent leurs intrants.