Le gouvernement fédéral a déjà commencé à resserrer l'entrée au pays des travailleurs étrangers temporaires, même si les changements annoncés dans le cadre de la réforme de l'assurance-emploi ou lors du dernier budget n'ont pas encore fait l'objet d'une loi ou d'un règlement.

Environ 350 Guatémaltèques font les frais de ce soudain resserrement administratif. Ils devaient déjà être arrivés au Québec pour travailler dans les champs, mais ils sont retenus dans leur pays d'origine dans l'attente d'un visa. Si l'arrêt d'émission de visas se poursuit toute la semaine, le nombre de travailleurs en retard passera à 800.

Agriculteurs nerveux

«On observe un durcissement du gouvernement fédéral. Ça occasionne de l'attente qui rend les agriculteurs extrêmement nerveux», dit Denis Hamel, directeur général de la Fondation des entreprises en recrutement de main-d'oeuvre agricole étrangère (FERME). L'organisme fait du placement de main-d'oeuvre étrangère auprès des entreprises agricoles. «Ils appliquent à la lettre le programme, qui existe depuis plusieurs années, poursuit-il. Ça étire les temps d'attente et ça complique les choses en matière d'exigences.»

Ce resserrement administratif a précédé de quelques semaines le brouhaha causé par l'utilisation de travailleurs étrangers par un sous-traitant de la Banque Royale, qui a eu pour effet de faciliter l'élimination de postes au Canada au bénéfice d'un pays à bas coût de production.

Jusqu'à tout récemment, Immigration Canada acceptait d'attendre l'arrivée des travailleurs étrangers au pays avant d'enregistrer leur nom et celui de leur employeur, explique M. Hamel.

Or, juste avant Pâques, revirement de situation, l'administration fédérale exige dorénavant que le nom du travailleur soit connu au moment de la demande faite à Service Canada. Aux ambassades du Canada, on refuse de délivrer les visas tant que les papiers qui émanent de Service Canada ne contiennent pas le nom des travailleurs qui vont l'administration fédérale exige dorénavant que le nom du travailleur soit connu au moment de la demande faite à Service Canada.

Plus précisément, 1500 travailleurs agricoles étrangers sur 8000 sont arrivés au Québec, d'après l'organisme FERME. À pareille date les années passées, ils étaient 1850 en sol québécois.

Il n'a pas été possible d'obtenir immédiatement la version de Citoyenneté et Immigration Canada. On nous a promis une réponse aujourd'hui.

Pour l'instant, Les Productions Margiric, producteur maraîcher de Laval, n'en pâtit pas trop parce que le printemps se fait désirer. «Personnellement, je n'ai pas subi de retard parce que j'attends mes travailleurs du Guatemala en mai seulement», dit Martin Gibouleau, son vice-président. Margiric emploie entre 70 et 80 Guatémaltèques par année.

Pour d'autres employeurs, le temps commence à presser. «J'ai fait une demande pour 22 travailleurs en novembre dernier, et je n'ai toujours pas de nouvelles», nous dit une employée d'une entreprise d'aménagement paysager de la région montréalaise qui ne veut pas être nommée. L'entreprise, qui donne du travail à 70 personnes en haute saison, a recours à la main-d'oeuvre étrangère depuis une dizaine d'années.