Pour décourager l'endettement excessif, il faudra peut-être que les taux d'intérêt augmentent, mais il semble que les consommateurs comprennent déjà le message, a estimé mardi le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney.

De passage à Toronto, le gouverneur a dit croire que les avertissements de la Banque à propos des hausses imminentes des taux d'intérêt pouvaient faire changer le comportement des emprunteurs.

Dans un discours portant sur les avantages pour une banque centrale d'annoncer ses intentions à l'avance, M. Carney a déclaré que ses nombreuses mises en garde au sujet des hausses de taux d'intérêt à venir ont pu influencer les consommateurs quant à leur choix en matière de prêts hypothécaires.

Le gouverneur a souligné que les parts de marché des prêts hypothécaires à taux fixe ont doublé cette année pour atteindre 90 pour cent. Il a attribué ce changement aux taux attrayants qui sont désormais offerts pour des hypothèques à taux fixe et aux avertissements de la banque centrale. Par ricochet, la demande pour les prêts à taux variables a chuté.

Depuis septembre 2010, la Banque du Canada n'a pas dérogé à sa politique de maintenir son taux directeur à un pour cent. Depuis le début de 2012, toutefois, l'institution a prévenu que son prochain changement de direction, lorsqu'il surviendra, résultera en une hausse des coûts d'emprunt pour les Canadiens.

Selon Mark Carney, plus une banque centrale est transparente quant à ses intentions futures, plus les intervenants économiques agissent en fonction des attentes. Il a toutefois tenu à préciser que les indications prospectives fonctionnent seulement si l'institution qui les énonce est crédible.

Par ailleurs, trop de transparence peut avoir un impact néfaste parce que les indications d'une banque centrale ne constituent pas une «promesse», a-t-il noté. Après tout, les gouverneurs doivent s'ajuster aux aléas de l'économie.

L'allocution de M. Carney, qui peut être interprétée comme un avant-goût de ce qu'il entend faire à la tête de la Banque d'Angleterre à partir du 1er juillet, visait à faire valoir défendre le point de vue selon lequel la nécessité pour une banque centrale d'alerter les marchés quant à ses intentions futures augmente en fonction de la gravité des problèmes affectant l'économie.

Dans des «circonstances extraordinaires», une description que Mark Carney pourrait vraisemblablement appliquer à l'économie britannique actuellement, une banque centrale a tout intérêt à accroître la précision des indications prospectives sur sa politique monétaire, a soutenu le gouverneur.

C'est ce que M. Carney a fait en avril 2009 lorsqu'il a affirmé qu'il comptait maintenir le taux directeur de la Banque du Canada à 0,25 pour cent jusqu'au deuxième trimestre de 2010.

Comme la banque centrale ne pouvait pas descendre son taux plus bas, elle a voulu augmenter sa force de frappe en garantissant que cette situation exceptionnelle allait se poursuivre pendant un certain temps.

«Grâce à son engagement conditionnel, la Banque a réussi à modifier les attentes des marchés concernant la trajectoire future des taux d'intérêt, ce qui a fourni l'impulsion souhaitée (à l'économie)», a expliqué Mark Carney.

Il a fait remarquer que la Federal Reserve des États-Unis est allée encore plus loin en s'engageant à ne pas hausser son taux directeur avant juin 2015.

M. Carney a ajouté que lorsque leur taux directeur frôle le zéro, les banques centrales pourraient avoir plus d'impact sur l'économie en liant leurs décisions futures à l'atteinte de certains seuils de croissance économique.

Il a toutefois mis en garde contre la confusion qu'une telle approche pourrait entraîner sur les marchés financiers, plus particulièrement en période d'incertitude économique.