L'avocat fiscaliste Paul Ryan critique la lutte féroce que mène le gouvernement du Québec contre l'évasion fiscale. Dans un livre à paraître demain, il affirme que les cibles de récupération sont beaucoup trop ambitieuses, que le gouvernement est incapable de les atteindre. L'avocat craint même que l'économie du Québec souffre de cette bataille si le fisc continue de pousser des entreprises légitimes à la faillite avec des cotisations astronomiques.

La thèse défendue dans le livre Quand le fisc attaque, publié aux éditions La Presse, fait contrepoids aux arguments véhiculés par Revenu Québec sur l'efficacité de sa lutte contre l'évasion fiscale depuis deux ou trois ans.

«On est de moins en moins capable de les arrêter (les agents du Revenu Québec) parce qu'ils sont pressés de cotiser en raison d'objectifs qui sont trop ambitieux. Je voyais le découragement des entreprises que je représente. L'impact négatif que ça peut avoir sur l'économie. J'ai cru que c'était mon devoir, à 52 ans, de raconter ce que je vois», dit l'avocat de renom qui défend à temps plein des contribuables ayant le fisc aux trousses. Paul Ryan est aussi le fils de Claude Ryan, ancien éditorialiste du Devoir et ancien ministre libéral dans les gouvernements de Robert Bourassa.

L'auteur n'hésite pas à dénoncer les cibles irréalistes pour expliquer le zèle de Revenu Québec dans l'avis de cotisation d'environ 4 millions de dollars envoyé à Hydro-Québec. Le conflit entre les mains droite et gauche du gouvernement s'est réglé à l'amiable sur ordre du ministre des Finances, Raymond Bachand, après que celui-ci eut pris connaissance du litige en lisant La Presse en septembre dernier.

Paul Ryan doute du succès financier de la lutte contre l'évasion fiscale. «Les statistiques révèlent que le gouvernement semble avoir beaucoup de difficultés à percevoir les montants des cotisations additionnelles émises», écrit-il. Les sommes que le gouvernement soutient avoir récupérées sont des sommes cotisées et non pas collectées.

À ce propos, le vérificateur général a dénoncé au début du mois de mars le fait que Revenu Québec avait surévalué ses entrées de fonds réelles découlant du Plan de retour à l'équilibre budgétaire. Cette surévaluation prend la forme d'un écart entre les créances douteuses budgétisées et réelles. Depuis cinq ans, l'écart s'élève à 1,8 milliard.

Malgré cet écart, Québec continue de surévaluer ses entrées de fonds pour les prochains exercices. Le gouvernement a en effet budgétisé des créances douteuses de 850 millions par année, bien que les créances douteuses réelles aient été de 900 millions ou plus depuis deux ans. Ce niveau de 850 millions est d'autant plus étonnant que les cibles de récupération fiscale additionnelle augmentent de 75%, passant de 2 à 3,5 milliards.

Quand le fisc attaque; acharnement ou nécessité? est en librairie demain.