La prime que doit consentir le Québec pour financer sa dette par rapport à l'Ontario diminue. La détermination de Québec à rétablir l'équilibre budgétaire dès 2013-2014, jumelée aux tergiversations de l'Ontario dans la même démarche, explique ce phénomène dont l'ampleur aurait été inimaginable il y a quelques années à peine.

La semaine dernière, la prime était d'environ 10 centièmes pour une obligation de 30 ans du Québec par rapport à celle de l'Ontario. En 2009, au beau milieu de la crise financière, l'écart était supérieur à 30 points centésimaux.

Pour les échéances les plus courtes, de deux ans par exemple, la différence est d'à peine trois centièmes. «C'est très faible. Nous, on appelle ça du bruit quand c'est rendu à ces niveaux, fait remarquer Gilles Chouinard, cochef, gestion des obligations, chez Natcan. Si les finances de l'Ontario ne s'améliorent pas, le niveau d'endettement sera aussi élevé que celui du Québec.»

«Les finances québécoises posent moins problème à court terme», renchérit Jean-François Godin, vice-président, recherches, chez Valeurs mobilières Desjardins.

Loin du déficit zéro

Le Québec s'en va vers le déficit zéro, ce qui n'est pas du tout le cas en Ontario. Le gouvernement minoritaire de Dalton McGuinty cible l'année 2017-2018 pour le retour à l'équilibre budgétaire.

Le 15 février toutefois, le rapport de la Commission sur la réforme des services publics de l'Ontario a été déposé par son président, l'économiste réputé Don Drummond. À ses yeux, cette cible est hors de portée, à moins de contenir la croissance des dépenses à 0,8% par année d'ici là. Cela représente à la fois un défi titanesque et un exercice politique périlleux.

Voilà pourquoi l'agence de notation DBRS a émis un avertissement à la suite de la publication du rapport. «Même s'il reste de la marge dans la note de crédit actuelle, le manque de détermination et d'efforts pour réduire significativement la croissance des dépenses dans le prochain budget serait source d'inquiétudes grandissantes chez DBRS», note-t-elle.

DBRS note le crédit de l'Ontario AA (Low) soit une coche de mieux que la note A (High) du Québec.

Moody's a donné une perspective négative à la note Aa1 de l'Ontario, l'automne dernier.

La note du Québec est jugée stable par toutes les agences de notation. «C'est cohérent avec une économie moins frappée par la récession», note Warren Lovely, stratège, dette gouvernementale, chez CIBC.

Le gouvernement ontarien n'a pas encore indiqué la date de son prochain budget, sans doute déterminant. Québec entend déposer le sien à la fin de mars. La rumeur veut que ce soit le mardi 20 mars ou le jeudi 22 mars.

Le Québec avantagé

Le Québec profite ces jours-ci de l'embellie sur les marchés obligataires canadiens. Quand les investisseurs recherchent du rendement, ils vont vers les provinces qui en offrent davantage, ce qui permet au Québec de vendre sa dette un peu plus cher. En plus, les investisseurs accordent moins d'importance à la prime de risque politique, sujet délicat s'il en est.

À l'inverse, quand le sentiment dominant est l'aversion au risque, la dette de l'Ontario retrouve un avantage, en raison en outre de sa plus grande liquidité.

La dette totale de l'Ontario est de quelque 250 milliards de dollars, ou 39% de son produit intérieur brut (PIB). Celle du Québec atteint 208 milliards, soit 63% de son PIB.

Pour que la situation s'inverse définitivement, il faudrait une nette aggravation des finances ontariennes ou un choc de rentrées fiscales favorables au Québec. Ce pourrait être le cas, par exemple, si l'exploitation du pétrole de l'île d'Anticosti ou du golfe se concrétisait.