L'endettement accru des ménages canadiens préoccupe les économistes et les analystes financiers, qui appréhendent les contrecoups lors d'une éventuelle remontée de taux d'intérêt.

Mais pour ajouter à ces soucis, une nouvelle analyse de la Banque CIBC constate que les Canadiens qui contribuent le plus à la hausse de cet endettement sont aussi ceux qui peuvent le moins se le permettre.

Il s'agit des ménages qui sont déjà les plus endettés, mais aussi des ménages d'âge mûr qui se rapprochent de la retraite.

Selon les données de la CIBC, l'endettement moyen des ménages canadiens atteint maintenant l'équivalent d'une fois et demie (151%) leur revenu disponible (après impôt), comparativement à 130% il y a cinq ans.

Aussi, la croissance du revenu disponible des ménages canadiens s'est dégradée à son niveau le plus bas depuis 15 ans, au début des années 90. L'analyse de la CIBC souligne que l'endettement moyen des Canadiens est désormais supérieur à celui de leurs voisins américains, qui a régressé depuis la crise financière de 2008.

Il dépasse aussi l'endettement moyen dans des pays européens comme l'Italie, l'Espagne et le Portugal, qui sont déjà en crise de leurs dettes publiques nationales.

Mais plus troublant, l'analyse de la CIBC constate que le tiers (34%) des ménages canadiens qui se classent désormais parmi les plus endettés sont aussi responsables de près des trois quarts de tout l'endettement des ménages.

Par ailleurs, l'âge moyen des Canadiens les plus endettés s'est élevé de façon notable depuis quelques années, selon l'analyse des économistes de la CIBC.

Ainsi, les Canadiens de 45 ans et plus comptent maintenant pour près de la moitié (44%) du nombre des citoyens les plus endettés. Ils étaient à peine plus du tiers (36%) de ce nombre il y a cinq ans.

«La part des 45 ans et plus parmi les Canadiens plus endettés a augmenté beaucoup plus rapidement que leur part de la population totale», soulignent les économistes Avery Shenfeld et Benjamin Tal.

Par conséquent, constatent-ils, «les Canadiens qui devraient être dans leurs années de plus forte épargne en vue de la retraite se retrouvent en fait de plus en plus endettés. Le taux de faillite personnelle parmi les 50 ans et plus est déjà en hausse.»

Cela dit, les économistes de la CIBC n'appréhendent pas encore une éclosion marquée du nombre de faillites parmi ces ménages canadiens les plus endettés. Du moins, tant que les taux d'intérêt aux particuliers demeureront très bas. Cette situation pourrait durer encore deux à trois ans selon les plus récents énoncés de la Banque du Canada et de la Réserve fédérale américaine (Fed).

En contrepartie, ce que les économistes de la CIBC appréhendent le plus, c'est l'impact sur l'économie d'un soudain resserrement de dépenses forcé parmi le nombre croissant de ménages les plus endettés.

Un tel freinage pourrait se répercuter rapidement dans certains secteurs importants de l'économie comme l'habitation, où il risque d'accentuer un ralentissement déjà en cours.

«De plus en plus de Canadiens atteignent la limite de leur capacité de rembourser leurs dettes, ce qui se manifeste par un ralentissement du taux d'endettement. Si cette tendance persiste, le marché de l'habitation risque d'être le plus affecté dès la prochaine année, surtout dans les mises en chantier et les prix de revente des propriétés», anticipent les économistes de la CIBC.

Dans un tel contexte, ajoutent-ils, «l'économie canadienne deviendrait plus vulnérable à la conjoncture internationale qui demeure embrouillée par les impacts du resserrement des dépenses publiques et de la fiscalité dans la plupart des pays développés».