Le régime de pension dont bénéficient les parlementaires est le plus problématique de l'appareil fédéral et les députés et les sénateurs devraient prêcher par l'exemple en se serrant eux-mêmes la ceinture.

C'est la conclusion d'un rapport de l'Institut CD Howe publié hier. Le think tank canadien joint ainsi sa voix à d'autres qui réclament une réforme semblable, au moment où Ottawa n'écarte pas la possibilité de compressions dans les caises de retraite des fonctionnaires fédéraux. Mercredi, la Canadian Taxpayer's Federation (CTF) avait elle aussi réclamé de tels changements, dans un rapport dans lequel elle a dressé la liste des contributions payées aux parlementaires après leur retrait de la vie politique.

Le rapport de la CTF indique entre autres qu'une trentaine de députés du Bloc québécois défaits aux dernières élections pourront bénéficier de paiements totalisant près de 40 millions de dollars au cours de leur vie. À lui seul, l'ancien chef de la formation, Gilles Duceppe, aura droit à environ 2,9 millions de dollars, soit 141 000$ par année.

Stephen Harper pourrait empocher jusqu'à 6 millions entre son départ du bureau du premier ministre et son décès. Et le néo-démocrate Pierre-Luc Dusseault, plus jeune député de l'histoire du Canada, pourrait récolter 40 000$ par année, ou 1,3 million, au cours de sa vie s'il prend sa retraite au terme d'un second mandat, vers l'âge de 27 ans.

Ces données sont basées sur des évaluations de la Taxpayer Federation et tiennent compte du fait que les parlementaires ne peuvent toucher à leur rente avant l'âge de 55 ans.

«Ça pourrait prendre à un Canadien régulier près de 30 ans pour économiser assez pour bénéficier des paiements de pension que peut recevoir un député d'arrière-ban après seulement six ans», dénonce la Fédération dans son rapport.

CD Howe dresse lui aussi à un constat sévère. L'institut canadien note que le régime de pensions des parlementaires est sous-capitalisé, en raison des faibles contributions faites par les bénéficiaires, entre autres, et que son déficit pourrait déjà atteindre 1 milliard de dollars.

Le groupe de réflexion a recommandé de hausser les salaires des parlementaires pour permettre de baisser leurs bénéfices de retraite - une solution dont il reconnaît le potentiel d'impopularité.

La CTF estime pour sa part qu'Ottawa devrait diminuer graduellement les bénéfices pour les nouveaux députés, et les inciter à contribuer plutôt dans un régime de pension agréé collectif, comme celui que le gouvernement Harper tente de mettre sur pied.

Les partisans de tels changements pourraient avoir un allié de taille en la personne de Stephen Harper: en entrevue à Radio-Canada, plus tôt cette semaine, le premier ministre a indiqué qu'aucune décision n'avait été prise en ce qui concerne les caisses de retraite des employés de l'État, mais que les parlementaires devraient certainement mener la marche si des compressions étaient imposées à cet égard.

Les divers régimes de pension des employés du gouvernement canadien représentent un boulet financier de 143 milliards, selon une note d'information préparée pour le premier ministre Harper il y a deux ans, et obtenue par La Presse. L'Institut CD Howe affirme quant à lui que les engagements financiers non capitalisés s'élèvent à 227 milliards.