L'harmonisation des taxes de vente provinciale et fédérale a provoqué la grogne en Ontario et en Colombie-Britannique, où cette mesure a rendu certains produits plus chers. Qu'en est-il au Québec, où les gouvernements Charest et Harper ont ratifié une entente vendredi? Les consommateurs ne verront aucune différence, indiquent les experts. Mais les grandes entreprises vont gagner au change.

En créant la TPS, il y a 20 ans, le gouvernement Mulroney n'a pas seulement trouvé une nouvelle source de revenus. Il a aussi réformé une manière de taxer qui datait des années 1920, et qui était perçue comme nuisible pour la compétitivité de l'économie canadienne. La TPS est une taxe sur la valeur ajoutée. Elle s'applique aux produits finis qui sont vendus aux consommateurs. Les entreprises ne paient pas la TPS sur les biens et services qui entrent dans la fabrication de leurs produits, ce qu'on appelle les «intrants».

Le Québec a été la première province - et longtemps la seule - à épouser cette formule. Les gouvernements libéral et péquiste ont réformé le régime au cours des années 90, si bien qu'il est aujourd'hui à peu près identique au régime fédéral.

«Le Québec a fait 95 % du travail, résume le fiscaliste Luc Godbout, professeur à l'Université de Sherbrooke. C'est pour cela qu'il n'y a pas d'impact sur le consommateur.»

En Ontario, certains produits qui n'étaient pas soumis à la taxe provinciale coûtent plus cher aujourd'hui, par exemple le nettoyage à sec. On n'envisage aucun scénario semblable au Québec, où la TPS et la TVQ s'appliquent à toutes fins pratiques aux mêmes biens et services. L'accord d'hier prévoit que les rares produits qui sont exemptés de TVQ, comme les livres et les couches, le resteront.

En ratifiant l'entente d'hier avec Ottawa, le gouvernement du Québec s'engage à ne plus appliquer la TVQ au prix de vente des biens et services incluant la TPS. Autrement dit, il cesse de «taxer la taxe». Mais le montant payé par les consommateurs restera le même, car le taux de la TVQ va passer de 9,5 % à 9,975 %.

L'accord prévoit que les achats des institutions financières ne seront plus exemptées de TVQ à compter de 2013. Cette mesure sera compensée par l'élimination d'une taxe compensatoire.

Les grandes entreprises y gagnent

Si l'harmonisation des taxes ne fera aucune différence pour les consommateurs, la mesure devrait en revanche profiter aux grandes entreprises. Le régime actuel prévoit que les sociétés dont les ventes dépassent 10 millions doivent payer la TVQ sur les voitures, le carburant, l'électricité, le gaz, les services de télécommunication et les repas. Tous ces intrants commenceront à être exemptés de TVQ à compter de 2018.

Lorsque cette mesure sera pleinement en vigueur, le gouvernement du Québec sera privé de revenus de 945 millions par année.