Des bonbons fiscaux pour ceux qui investissent dans les entreprises en démarrage: en pleine campagne électorale, c'est ce que promettent les Libéraux ontariens de Dalton McGuinty afin de créer des emplois. Ces promesses sont bien accueillies au Québec, où le milieu de l'innovation ne craint pas de voir les investissements migrer vers la province voisine.

Dans sa plateforme électorale, le Parti libéral ontarien a dévoilé un volet destiné à créer des emplois dans le secteur de l'innovation.

Le document renferme peu de détails, mais le quotidien The Globe and Mail en a révélé cette semaine la pierre angulaire: un crédit d'impôt de 35% accordé aux anges financiers et aux institutions qui investissent du capital-risque, cet argent misé sur les entreprises en démarrage dans l'espoir de les voir percer.

Au Québec, où de tels crédits d'impôt n'existent pas, l'industrie du capital-risque ne s'inquiète pas.

«Ces mesures s'adressent beaucoup aux entreprises en démarrage, qui sont généralement financées localement de toute façon. Dans ce sens, c'est plutôt positif parce que ça peut contribuer à créer un buzz autour de la technologie canadienne. S'il y a plus d'entreprises qui se créent en Ontario, ça peut avoir des effets ici», dit Geneviève Morin, chef de la direction financière de Fondaction CSN et coprésidente de Réseau capital, le regroupement du capital-risque québécois.

Jacques Bernier, associé principal de la firme québécoise Teralys - le plus gros réservoir de capital-risque au pays - voit aussi les promesses libérales d'un bon oeil.

«Je ne vois pas d'éléments là-dedans qui pourraient être négatifs pour le Québec, au contraire. Il faut augmenter la quantité d'argent totale qui va dans le capital-risque, et n'importe quelle nouvelle source d'argent représente une bonne nouvelle», dit-il.

Il faut dire que l'Ontario est un peu en mode rattrapage par rapport au Québec pour ce qui est du capital-risque.

Au dernier trimestre, malgré une population et un PIB plus élevés en Ontario, les deux provinces étaient nez à nez en termes d'investissements - 116 millions en Ontario contre 112 au Québec. Les fonds de capital-risque ontariens se renflouent aussi moins rapidement que les fonds québécois, ce qui laisse présager une baisse des investissements en Ontario.

Le ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation du Québec n'a pas voulu commenter la proposition des Libéraux ontarien, invoquant le fait que la province est en campagne électorale.

Même si la province n'offre pas de crédits d'impôt, l'industrie du capital-risque reconnaît que Québec a instauré plusieurs mesures au cours des dernières années pour stimuler ce type d'investissements.

Parmi celles-ci, notons la création de Teralys, un «fonds de fonds» destiné à renflouer les fonds de capital-risque, ainsi que le lancement de fonds d'amorçage pour soutenir les entreprises naissantes. Québec a aussi accordé 20 millions à Anges Québec pour bonifier les investissements des anges financiers, ces particuliers qui investissent leur argent personnel dans les entreprises.

Chez Anges Québec, on étudie actuellement la pertinence de réclamer un crédit d'impôt comme le propose les Libéraux ontariens.

François Gilbert, président d'Anges Québec, se montre satisfait du soutien de Québec à son association, mais souligne que bien des anges n'en sont pas membres et n'en bénéficient donc pas. En ce sens, dit-il, un crédit d'impôt pourrait aider tout le monde.

Selon lui, un crédit d'impôt pourrait aussi inciter les anges à investir des montants plus importants dans les entreprises. Il doute cependant que la mesure conduirait à beaucoup de nouveaux investissements.

«On est en train d'étudier tout ça pour voir s'il est pertinent de demander un crédit, et, si oui, à quel niveau il doit se situer», dit M. Gilbert.