Même si l'économie a stagné, les bénéfices d'exploitation des sociétés canadiennes sont restés substantiels au printemps.

Ils ont atteint 64,0 milliards, évalue Statistique Canada. Il s'agit néanmoins d'un recul de 4,9% sur les profits du premier trimestre, marqué par une robuste croissance. Sur une base annuelle, les bénéfices restent en progression de 10,2%.

La décélération de l'augmentation des bénéfices est appelée à se poursuivre en deuxième moitié d'année, en particulier dans le secteur des ressources, marqué par des baisses de prix quasi généralisées.

En outre, le rebond de la croissance nord-américaine sera moins puissant que celui qu'on escomptait, il y a un mois encore.

«Le fait que les bénéfices continuent de progresser au-delà des 10% sur une base annuelle devrait avoir stimulé les investissements au deuxième trimestre», note Leslie Preston, économiste Chez TD.

«Cela aura été un élément lumineux d'un trimestre plutôt terne.»

On en aura le coeur net mercredi avec la publication des chiffres du PIB pour le deuxième trimestre, mesuré par la variation des comptes nationaux.

Dans le secteur financier, le repli atteint 7,9%, le segment de l'assurance-vie étant durement frappé par la faiblesse historique des taux d'intérêt qui alourdit la valeur du passif. Sur une base annuelle, leurs bénéfices avant impôts restent néanmoins 14,8% plus élevés qu'à la même époque l'an dernier, alors que le Canada entrait en expansion, une phase du cycle économique généralement marquée par une croissance plus lente que durant la reprise.

Dans le secteur non financier, le repli est limité à 3,8%, mais sur une base annuelle, la progression est plus lente, à hauteur de 8,7%.

Si 14 des 22 industries sondées affichent des reculs, ceux-ci sont concentrés, outre les assurances, dans la production manufacturière, le transport et l'entreposage.

Le repli manufacturier n'est pas étonnant pas quand on considère que les ventes des fabricants ont reculé tant en avril, en mai qu'en juin. Il a été toutefois aggravé par les incendies de forêt en Alberta qui a perturbé la transformation du pétrole et du charbon. Les bénéfices de ces fabricants ont chuté de 24,1%, mais ils devraient rebondir malgré le recul des prix grâce au retour de la production normale.

Croissance limitée

Le recul global de 4,9% doit être relativisé. Au premier trimestre, les bénéfices avaient bondi de plus de 20%, rappelle Marie-Claude Guillotte, économiste chez Valeurs mobilières Banque Laurentienne. «Si on retranche les éléments temporaires, le niveau des bénéfices demeure rassurant, mais c'est quand même un ralentissement.»

Une décélération qui risque de continuer si on se fie aux prévisions des économistes qui réduisent tous leur scénario de croissance tant pour 2011 que 2012.

Hier, c'était au tour de Desjardins. L'institution lévisienne ramène de 2,9% à 2,3% sa prévision de croissance au Canada cette année et de 2,7% à 2,1% celle de 2012. Les chiffres provinciaux sont aussi réduits. L'expansion québécoise est ramenée de 2,2% à 1,7% cette année et de 2,3% à 1,7% en 2012.

La prévision américaine est aussi réduite avec une projection de croissance ramenée à 1,5% en 2011 et 2012.

Avec pareille mollesse, les exportations vont faiblir, tout comme les bénéfices des exportateurs.

Ils seront touchés différemment, selon le Conference Board et la Banque de développement du Canada. Ils viennent de publier leurs perspectives pour les secteurs du bois, du papier, de l'automobile et de l'aéronautique.

Dans l'industrie très fragmentée du bois qui agglomère les scieries, les fabricants de parquets et de portes et fenêtres, on s'attend à ce que les profits remontent cette année et restent à de bons niveaux d'ici à 2015. La marge bénéficiaire devrait évoluer entre 3,6% et 5,2%.

Dans le papier, ça restera difficile, même si l'industrie sort cette année du rouge pour la première fois en quatre ans. La marge devrait plafonner à 1,7%, ce qui signifie tout de même un demi-milliard.

Dans le secteur automobile où l'on retrouve plusieurs fournisseurs de pièces, la remontée des bénéfices sera lente mais constante.

Dans l'aéronautique enfin, qui est resté à flot même durant la récession, les marges vont augmenter cette année et l'an prochain pour se stabiliser à hauteur de 3,4%.