La crise budgétaire a beau menacer les États-Unis, le huard se vendre à plus de 1,06$US, le calme régnait dans les salles de marché de devises, selon les témoignages des cambistes recueillis hier, en dépit de l'inquiétude ambiante. «Une journée d'été presque comme les autres», nous a-t-on résumé.

«Ce sont des marchés d'été. Il y a un peu moins de volume. Il y a plus ou moins de volatilité», dit au téléphone François Bélanger, directeur, marchés de change, chez BMO Marchés des capitaux.

Selon le cambiste de la Banque Laurentienne François Barrière, qui s'occupe de 600 clients commerciaux, importateurs et exportateurs, l'été 2011 est loin d'être excitant. «C'est même plate, dit le vice-président, Marchés internationaux, à la Banque Laurentienne. On entre le matin et le dollar canadien est un petit peu plus fort que la veille.»

Il explique que ses clients restent en attente. Les importateurs ont déjà acheté du dollar américain déprécié au point où ils en sont remplis à souhait. Quant aux exportateurs, «ils aimeraient bien vendre leurs billets verts, mais ils ne sont pas capables de les vendre parce que le taux n'est pas bon et celui-ci continue à descendre jour après jour».

De toute façon, les clients commerciaux sont plus actifs en début d'année et à l'automne, beaucoup plus rarement en été à moins d'une crise. «On parle de la crise, mais les marchés boursier et obligataire ne nous montrent pas une crise», dit M. Barrière. Le taux des obligations 10 ans se situe à 3,02%. «Tumulte peut-être, mais pas une crise.»

Dans ce contexte tumultueux, le dollar canadien a la cote. «Ce matin, sur le fuseau horaire de Londres, il y a eu une demande assez soutenue pour des dollars canadiens. On est allé chercher des niveaux de 1,0630$US, des niveaux pas vus depuis l'automne 2007», dit M. Bélanger, de BMO, qui a interrompu notre appel pour conclure une vente à terme de dollars canadiens.

Plusieurs facteurs expliquent la poussée du huard dans le dernier mois. La mésentente budgétaire aux États-Unis affaiblit le billet vert américain, ce qui profite au nôtre. La remontée prochaine des taux d'intérêt télégraphiée par la Banque du Canada stimule aussi la demande pour notre devise. Également, le prix record de l'or influence à la hausse la valeur du dollar canadien, encore perçu comme une monnaie dont la valeur est liée aux prix des matières premières.

Risque d'une décote

Pourquoi cet élan irrésistible laisse-t-il les cambistes de marbre' La hausse de la monnaie canadienne est beaucoup moins subite que lors des niveaux atteints en 2007, explique Frédéric Mayrand, premier vice-président, Marchés des capitaux, chez BNP Paribas Canada. «L'appréciation du dollar canadien s'inscrit dans une tendance. Ce n'est pas soudain. Ça fait deux ans et demi que le dollar canadien se renforce», souligne-t-il.

Depuis le début de la semaine, les cambistes de la BNP Paribas attendent de voir ce que les élus américains vont faire. Va-t-il y avoir une solution à la crise budgétaire' Celle-ci sera-t-elle temporaire ou à plus long terme'

Le temps passerait à l'orage si les Américains ne parvenaient pas à s'entendre sur un nouveau plafond de leur dette d'ici la date butoir du 2 août.

«Le risque d'une décote n'est pas nul du tout. [L'agence de cotation] S&P a été assez claire: si l'entente n'était pas sérieuse, elle décoterait quand même la dette américaine, de AAA à AA+ sans doute. Le marché serait alors surpris et on connaîtrait une période d'ajustements», dit M. Mayrand.

Autrement, si le pire était évité et qu'il n'y avait finalement ni défaut ni décote, François Bélanger, de BMO, s'attend à un léger repli de la devise canadienne autour de 1,04$US. «À moyen terme, la tendance de fond demeure très favorable au dollar canadien», soutient-il.

À la fermeture des marchés hier à 16 h, le dollar canadien se vendait 1,0607$US, en hausse de 0,0034$US.