Après avoir fermé sa raffinerie de Montréal, Shell veut maintenant se départir de son réseau de stations-service au Québec et dans les Maritimes.

«On sonde le marché», a précisé hier David Saint-Laurent, directeur général du secteur de détail de Shell au Canada, au cours d'un entretien avec La Presse Affaires. Idéalement, Shell aimerait vendre en bloc ses 260 points de vente et continuer de les approvisionner avec des contrats à long terme.

Cette décision n'est pas une surprise. Plusieurs observateurs avaient prévu qu'une fois sa raffinerie fermée, Shell n'aurait plus d'intérêt à conserver un réseau de stations-service.

L'entreprise se défend d'abandonner le Québec. Elle présente même sa décision comme une occasion «d'accroître ses activités de détail au Québec et dans les Maritimes».

Shell ne délaisse pas le marché du Québec, a plaidé M. Saint-Laurent. «On veut passer à un modèle où on s'allie avec un partenaire qui fera croître le réseau», a-t-il expliqué.

Shell ne prévoit pas faire la même chose ailleurs au Canada. La décision de vendre n'a pas été prise parce que le marché québécois est en déclin, mais parce qu'il est différent. «La compétition est différente au Québec, il y a plus d'indépendants et un raffineur important (Ultramar)», a précisé le porte-parole de Shell.

L'entreprise en est venue à la conclusion qu'une vente de ses stations-service assortie à un contrat d'approvisionnement à long terme avec le ou les acheteurs était ce qu'il y avait de mieux à faire. «On croit que c'est la recette du succès», a dit M. Saint-Laurent.

Shell, comme les autres pétrolières, délaisse de plus en plus les activités de raffinage et de détail pour se concentrer sur l'exploration et la production de pétrole, des activités plus rentables, mais qui exigent des investissements massifs.

Des acheteurs

Shell souhaite continuer d'approvisionner les 260 stations-service, ce qui exclut de prime abord de les vendre à des concurrents comme Esso ou Ultramar, qui ont leur propre source d'approvisionnement.

Selon des sources proches de l'industrie, un détaillant comme Couche-Tard - qui ne produit pas de pétrole et qui peut vendre d'autres choses en plus de l'essence - est un acheteur possible pour le réseau de Shell. Les deux entreprises sont déjà partenaires aux États-Unis.

Aucun commentaire n'a pu être obtenu de la part de la direction de Couche-Tard hier.

Si Shell ne réussit pas à trouver le partenaire idéal qui lui permettrait de continuer d'écouler ses produits au Québec, elle devra probablement vendre ses stations-service sans contrat d'approvisionnement.

Les autres pétrolières qui veulent accroître leur présence au Québec pourraient alors être intéressées à en faire l'acquisition.

Ultramar avait déjà fait part de son intérêt pour le réseau de Shell, mais sa capacité d'expansion est limitée par sa présence déjà importante dans les marchés du Québec et des Maritimes. Le Bureau de la concurrence sourcille lorsque la part de marché d'une pétrolière s'approche de la barre des 30%.

Un réseau de détail comme celui mis en vente par de Shell pourrait valoir entre 300 et 500 millions de dollars, soit entre 1 et 2 millions par station-service. Le prix de vente dépend de l'état des stations-service. Il devrait évidemment être plus bas si Shell continue d'approvisionner le réseau.

Les agents et employés qui travaillent au quotidien dans les stations-service mises en vente par Shell ont appris la nouvelle en même temps que tout le monde hier.

«On ne sait pas à quoi s'attendre», a dit l'un d'eux, qui travaille dans une station-service de l'avenue Christophe-Colomb.

Shell n'a aucun employé dans les stations-service qu'elle met en vente, mais des agents sous contrat qui, eux, embauchent des employés. Les éventuels acheteurs ne seraient pas liés par ces contrats, selon ce qu'il a été possible d'apprendre. Il y a 190 autres revendeurs de la marque Shell au Québec et dans les Maritimes qui ne feront pas partie de la transaction.

Shell espère conclure une transaction avant la fin de l'année, a indiqué hier son porte-parole.

L'entreprise attend toujours les autorisations gouvernementales qui lui permettront de démanteler sa raffinerie de Montréal, qui a cessé ses activités en septembre dernier et mis à pied 500 employés.

DEUX RAFFINERIES (Sarnia, en Ontario, et Scotford en Alberta)

- UN TERMINAL ÀMONTRÉAL

- 1600 POINTS DE VENTE

- À VENDRE: 260 STATIONS-SERVICE, DONT 205 AU QUÉBEC