Fort d'une majorité parlementaire pendant quatre ans, le gouvernement de Stephen Harper a tout le loisir de se doter d'un plan stratégique de réforme macro et microéconomique de manière à assurer la croissance économique.

Tel est en tout cas l'avis du Conference Board du Canada, qui a suggéré hier un ordre du jour qui va bien au-delà des mesures énoncées en mars par le ministre des Finances Jim Flaherty. «Le programme économique devrait se concentrer sur cinq thèmes prioritaires, écrivent Anne Golden et Glen Hodgson, figures dirigeantes du Board. S'attaquer à la productivité et à la compétitivité, créer un seul marché intérieur, repenser la force de travail, revitaliser l'investissement et le commerce international et investir dans les infrastructures.»

Les auteurs admettent d'emblée que le pouvoir du gouvernement en matière macroéconomique est limité. Ils soulignent néanmoins que le recours à l'équilibre fiscal s'impose et que sa marge de manoeuvre réside dans le choix des dépenses et des sources de revenus pour mettre fin dès 2015 à la série de déficits qui se seront suivis depuis 2008-2009.

À cet égard, Sherry Cooper, économiste en chef chez BMO Marchés des capitaux, signale que rien n'empêche désormais Ottawa d'aller de l'avant à compter du 1er janvier avec la réduction de l'impôt sur le revenu des sociétés. À 15%, il s'agira du taux le plus faible au sein du G7, celui des États-Unis étant de 35%.

Mary Webb, économiste chez Scotia Capitaux, rappelle pour sa part que les engagements pris en campagne électorale, dont le plus coûteux est le versement de 2,2 milliards au Québec en 2012 et 2013, ne devraient pas compromettre le retour vers l'équilibre si l'économie poursuit son expansion.

La volonté d'Ottawa d'augmenter de 6% les transferts aux provinces pour la santé dès 2014 posera problème cependant puisque la croissance nominale (en dollars courants) des recettes fiscales sera moins rapide.

Mme Golden et M. Hodgson ont toutefois leurs préférences: simplification du régime fiscal, stimulants à l'investissement et travail et reconnaissance des coûts relatifs aux émissions de gaz à effet de serre.

Favoriser l'innovation

Ils préconisent aussi de laisser le dollar flotter: «C'est aux entreprises canadiennes de s'adapter à la nouvelle réalité d'une monnaie forte en accélérant l'innovation et en adoptant des mesures pour stimuler la productivité», écrivent-ils.

À l'échelle microéconomique, ils suggèrent au gouvernement d'améliorer les mesures pour favoriser l'innovation. Le Board, rappellent-ils, travaille à la création d'un centre pour l'innovation des entreprises qui étudiera toute la problématique de cette priorité.

Sans surprise, le Board recommanda d'aller de l'avant avec une seule commission de valeurs pour l'ensemble du pays, si la Cour suprême l'autorise afin d'éliminer les chevauchements de juridictions. Le Board souhaite d'ailleurs l'élimination des barrières interprovinciales au commerce, à l'investissement et à la circulation de la main-d'oeuvre.

Les auteurs préconisent une stratégie fédérale en matière de main-d'oeuvre de manière à mieux intégrer les personnes handicapées, les autochtones, les immigrants, voire les femmes dans certaines industries.

«L'objectif d'accroître le nombre de travailleurs hautement qualifiés doit rester une priorité fédérale, écrivent les auteurs. Les transferts fédéraux aux provinces pourraient viser l'augmentation des diplômés en sciences et en génie.»

Sans surprise, les auteurs veulent qu'Ottawa aille de l'avant avec son désir de conclure des accords de libre-échange avec l'Union européenne, pas avec la Chine.

Ils soulignent enfin que la réfection des infrastructures nécessitera des investissements de 125 milliards, au seul échelon municipal. Ce déficit qualitatif nuit à la productivité, rappellent-ils.