C'est en Ontario surtout que les chefs des trois principaux partis politiques fédéraux concentrent leur blitz de fin de campagne. Et ce n'est pas sans raison.

> Suivez Martin Vallières sur Twitter

Selon des analystes politiques, c'est dans une quinzaine des 106 circonscriptions en Ontario que pourrait bien se décider le sort du gouvernement Harper: réélu minoritaire ou majoritaire.

Et ce, dans un contexte où la province la plus populeuse au Canada se relève lentement de sa pire récession économique en une génération.

En dépit d'un rebond de croissance économique depuis trois mois, le taux de chômage en Ontario s'accroche pour la troisième année consécutive à un niveau plus élevé que celui de tout le Canada. Et même du Québec voisin.

C'est donc sur le sujet des mesures de relance de la création d'emplois en Ontario, surtout dans le secteur manufacturier meurtri par la grave crise du marché automobile d'il y a deux ans, que les partis de l'opposition tentent le plus de défier le gouvernement conservateur.

Pour le chef néo-démocrate, Jack Layton, les «politiques économiques irresponsables» du gouvernement Harper seraient responsables de la fermeture de dizaines d'usines en Ontario et du transfert de leurs activités aux États-Unis et outre-mer.

Il propose donc, notamment, de remplacer les autres baisses d'impôt des entreprises proposées par les conservateurs par un crédit d'impôt de 4500$ pour chaque emploi créé.

Pour les libéraux et leur chef, Michael Ignatieff, les baisses d'impôt pour les entreprises préconisées par les conservateurs sont nulles pour la création d'emplois.

Ils proposent donc de les interrompre et de stabiliser l'imposition des entreprises à son niveau de l'an dernier. Ces revenus fiscaux seraient redirigés vers la réduction du déficit fédéral et certaines mesures d'économie familiale.

Toutefois, de l'avis d'analystes politiques, les propositions de ce type de la part des partis fédéraux de l'opposition pourraient avoir déjà trouvé écho parmi l'électorat ontarien.

Mais elles proviendraient du gouvernement conservateur grâce à ses diverses mesures fiscales et budgétaires instaurées au fil des ans, et proposées dans le budget énoncé juste avant le déclenchement des élections.

En baissant les impôts des familles à revenu modeste et des PME, tout en instaurant des mesures pointues d'aide aux familles, les conservateurs pourraient avoir réussi à «élargir leur appui parmi les électeurs ontariens qui ne votaient pas pour eux traditionnellement», estime Laura Stephenson, politicologue à l'Université Western Ontario, située à London.

Le jour du scrutin, lundi prochain, cette hypothèse pourrait se concrétiser le plus dans les circonscriptions de la grande banlieue de Toronto où prédomine l'électorat familial de classe moyenne.

Cet électorat comprend aussi de plus en plus d'immigrants aisés, un milieu où l'appui traditionnel aux libéraux migrerait vers les candidats conservateurs, selon les sondages locaux.

Mais dans les milieux d'affaires en Ontario, le choix électoral semble plus évident. On souhaite ouvertement la continuité des principales mesures fiscales instaurées par le gouvernement conservateur minoritaire de Stephen Harper.

«Les autres baisses d'impôt des entreprises proposées par les conservateurs représentent quelque 1,6 milliard par an pour les entreprises ontariennes. C'est une étape positive pour la relance des investissements et de la création d'emplois», selon Len Crispino, président de la Chambre de commerce de l'Ontario.

En contrepartie, s'ils apprécient le menu fiscal du gouvernement Harper, les dirigeants d'affaires en Ontario s'inquiètent de la suite des efforts financiers fédéraux dans divers projets d'infrastructures de transport.

Après les dépenses importantes des deux dernières années, il reste encore quelques projets dont la suite concrète est très attendue.

Entre autres, les secteurs industriel et agro-alimentaire en Ontario revendiquent la construction d'un second pont transfrontalier à Windsor, afin de soulager la congestion de l'actuel pont Ambassador.

Or, pour lancer ce projet des deux côtés de la frontière, un engagement financier d'au moins un demi-milliard de dollars est requis du gouvernement fédéral.

Le gouvernement Harper a déjà prévu des fonds pour ce projet. Mais ses opposants libéraux et néo-démocrates demeurent muets à ce sujet.

Par ailleurs, le milieu d'affaires de la région de Toronto s'impatiente de plus en plus de l'amélioration des services de transports publics.

Selon le Board of Trade of Toronto (chambre de commerce), un effort majeur est requis à brève échéance afin de soulager une congestion routière qui nuit de plus en plus à la compétitivité économique de la métropole ontarienne.

Le mois dernier, un nouveau plan de développement des transports publics évalué à 12 milliards d'ici 10 ans a été convenu entre le gouvernement de l'Ontario et la Ville de Toronto.

Mais la participation fédérale à cet ambitieux projet demeure incertaine au-delà des 300 millions proposés par le gouvernement Harper, pour une version antérieure.

L'ONTARIO EN CHIFFRES

Population totale 13,2 millions (38% du Canada)

Minorités visibles 23% de la population

Emplois (mars 2011) 6,69 millions (+0,1% en un an)

Taux de chômage (mars 2011) 8,1% (-0,7 point en un an)

Salaire hebdomadaire moyen 898$ (+3,8% en un an)

PIB provincial 2010 (réel) 523 milliards (+2,8% en un an)

Construction résidentielle 2010 60 000 unités (+20%)

Ventes au détail 2010 155 milliards (+5,4%)

Circonscriptions fédérales en Ontario 106

Élections de 2008 PCC 51, PLC 38, NPD 17

Circonscriptions les plus disputées en 2011 26

Sources: ministère des Finances de l'Ontario, Statistique Canada, rapports d'économistes bancaires,

Élections Canada, archives médias