Après le bond spectaculaire de l'emploi en janvier, on devait s'attendre à ce qu'il soit suivi d'une consolidation.

C'est précisément ce qui s'est produit en février, montrent les données de l'Enquête sur la population active (EPA) de Statistique Canada. Au cours du mois, il s'est créé 15 100 emplois d'un océan à l'autre, ce qui aura permis de stabiliser le taux de chômage à 7,8 % pour le deuxième mois d'affilée.

En plus d'un chiffre inférieur aux prévisions de 25 000 emplois, les détails de l'EPA sont ternes : tous les emplois sont à temps partiel, concentrés chez les jeunes et les travailleurs autonomes, deux catégories jugées molles par les spécialistes.

En fait, 38 900 emplois à temps partiel se sont ajoutés, alors que 23 800 temps plein ont été supprimés. Voilà qui explique pourquoi le nombre d'heures travaillées a reculé de 0,25 %, après être demeuré stable en janvier en dépit de l'addition de 69 200 emplois. « La baisse des heures de travail, conjuguée à un taux de croissance du PIB (produit intérieur brut) qui devrait être supérieur à son taux potentiel, présage une très belle hausse trimestrielle de la productivité au Canada », s'enthousiasment Yanick Desnoyers et Matthieu Arseneau, économistes à la Banque Nationale. On en aura une meilleure idée avec la publication des données pour le quatrième trimestre.

Au Québec, la société s'est enrichie de 8000 emplois, ce qui aura suffi à ramener de 7,9 % à 7,7 % le taux des demandeurs d'emploi. Ici aussi, tous les nouveaux postes sont à temps partiel. Il s'est par contre volatilisé plus de 25 000 postes à temps plein.

Tous les gains ont été réalisés dans le secteur des services, concentrés surtout dans les soins de santé, le transport et l'entreposage. Tous les segments du secteur des biens ont battu en retraite, y compris la fabrication.

Elle enregistre pourtant une remontée de 9000 emplois à l'échelle pancanadienne et de près de 50 000 en trois mois. Les manufacturiers embauchent hors Québec pour profiter de l'élan de l'économie américaine.

La reprise du secteur automobile y était pour beaucoup en janvier. En février, c'est un bond de 12 700 en Alberta qui a arraché la part du lion.

La province des scheiks aux yeux bleus est d'ailleurs celle qui a le mieux fait en février avec 1300 nouveaux emplois, dont la moitié à temps plein.

Il lui en manque néanmoins encore 19 900 pour effacer les ravages de la récession, même si le Canada en compte déjà 54 500 de plus qu'au cours du sommet de l'autre cycle. À ce chapitre, le Québec reste premier de classe avec 71 200 emplois de plus, selon la compilation de TD.

En somme, les résultats de février consolident les avancées des quatre mois précédents, résume Pascal Gauthier, économiste principal chez TD. « Ils rappellent aussi que les tensions mondiales peuvent déferler sur les rives d'une petite économie ouverte comme la canadienne. »

Même avec une variation nulle de l'emploi en mars, la moyenne mensuelle de nouveaux emplois pour le présent trimestre serait de 28 100, ce qui reste meilleur qu'en seconde moitié de 2010.

« Il faut s'attendre à ce que le marché du travail reprenne au cours des prochains mois une progression plus soutenable à long terme », souligne Benoit P. Durocher, économiste principal chez Desjardins, ce qui signifie en moyenne 25 000 emplois par mois. « Dans la réalité, certains mois dépasseront bien sûr ce niveau, mais d'autres seront inférieurs, comme ce fut le cas d'ailleurs en février. »

Rappelons enfin que l'EPA comporte un échantillon de 56 000 ménages répartis partout au pays. Sur une estimation de quelque 17,23 millions d'emplois, l'erreur d'échantillonnage est de 28 300. La progression de 15 100 emplois en février n'est par conséquent pas significative alors que la moyenne de trois mois confirme une tendance positive.