Après avoir laissé planer la nouvelle au cours des dernières semaines, le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, a confirmé mardi que le déficit du pays serait plus élevé que prévu cette année.

Si le dernier budget, déposé en mars 2010, annonçait un déficit de 53,8 milliards $, le ministre Flaherty a corrigé le tir, au moment de présenter sa mise à jour économique mardi, en indiquant qu'il atteindrait plutôt 55,6 milliards $ en 2009-2010.

M. Flaherty prévoit néanmoins un retour à l'équilibre budgétaire d'ici cinq ans, soit d'ici 2015-2016, alors que le Canada devrait afficher un surplus de 2,6 milliards $, selon les prévisions du ministère des Finances.

Le déficit a gonflé de 1,8 milliard $ par rapport aux prévisions budgétaires de mars 2010, une hausse que le ministre a justifié par le fait que «le Plan d'action tire à sa fin, alors que l'économie prend du mieux».

Mais dans l'opposition, on a dénoncé l'incapacité du ministre Flaherty à respecter ses perspectives économiques.

«Il est le ministre des Finances qui a le plus emprunté et le plus dépensé dans l'histoire canadienne. Et vous ne pouvez simplement pas vous fier à ses chiffres», a dénoncé le libéral Scott Brison.

Son chef, Michael Ignatieff, a quant à lui plaidé que M. Flaherty avait pris les rênes du ministère des Finances avec un surplus budgétaire, en 2006, mais que son gouvernement avait «tout claqué» avant même le début de la récession.

Des quelque 55 milliards $ de déficit prévu, près de la moitié - 21 milliards $ - sont attribuables aux dépenses engendrées par le plan de relance d'Ottawa. Près de 8 milliards $ de cette somme correspondent aux baisses d'impôt accordées en vertu du Plan d'action économique, tandis que 13,3 milliards $ sont attribuables aux mesures de dépenses.

Si l'économie mondiale va mieux qu'au plus fort de la récession qui a secoué la planète, l'activité économique demeure plus faible en 2009 qu'en 2008 et la reprise reste fragile, a réitéré le ministre Flaherty, à l'instar de ses mises en garde des dernières semaines.

Mais le ministre demeure confiant que le ralentissement économique se résorbera.

Malgré l'incertitude qui plane toujours, M. Flaherty a soutenu, en point de presse suite à son discours prononcé à Mississauga en Ontario, qu'Ottawa ne prévoyait pas de nouveau plan de relance. Sauf que pour la première fois en plusieurs semaines, le ministre n'a pas été catégorique, laissant la porte ouverte à de nouvelles mesures.

«Nous ne prévoyons pas avoir besoin de davantage de stimulus. Nous surveillons l'économie, nous sommes sur la bonne voie, mais nous allons surveiller s'il est nécessaire d'en faire plus éventuellement, si l'économie se détériore», a-t-il indiqué.

Or, de l'avis de l'opposition bloquiste, un nouveau plan de relance ne peut se faire attendre trop longtemps et on s'inquiète qu'il ne soit mis en place trop tard pour aider les travailleurs.

«Le problème c'est qu'ils n'ont aucun plan, ils n'ont pas de vision», a pour sa part déploré le néo-démocrate Thomas Mulcair, en soulignant que l'économie canadienne était intimement liée à celle des États-Unis, qui se porte moins bien.

Du côté libéral, on a prévenu qu'un second plan de relance des conservateurs devrait être différent du premier.

«Plutôt qu'un programme pour remettre l'économie canadienne sur pied, c'était un programme pour permettre la réélection du Parti conservateur», a scandé M. Ignatieff.

Les dépenses en infrastructures du gouvernement avaient été jugées partisanes par l'opposition, nombre d'entre elles ayant été attribuées à des comtés conservateurs.

Même s'il a reconnu que «le Canada disposait de nombreux avantages qui ont atténué l'impact de la crise sur les Canadiens», le ministre Flaherty a fait valoir, dans son discours devant la Mississauga Chinese Business Association mardi midi, les réussites du plan de relance de son gouvernement.

Selon la plus récente mise à jour économique du ministre conservateur, les revenus du pays ont diminué de 14,5 milliards $, par rapport à l'exercice précédent, notamment en raison de la baisse des rentrées d'impôt sur le revenu des particuliers, compte tenu de la faible progression du revenu personnel et des allègements fiscaux accordés dans le plan de relance.

Ottawa a également dû encaisser une hausse des charges, qui ont augmenté de 35,4 milliards $ cette année. La mise en oeuvre du Plan d'action économique y est, là encore, pour quelque chose, de même qu'une hausse prévue des transferts aux provinces.

Cette enveloppe compte également le versement de 5,9 milliards $ à l'Ontario et la Colombie-Britannique en guise de compensation à l'harmonisation de la taxe de vente - un dédommagement aussi réclamé par Québec, mais auquel Ottawa réplique que la taxe de vente québécoise n'est pas entièrement harmonisée à celle du fédéral.

La baisse des revenus d'Ottawa a cependant été compensée en partie par une hausse des rentrées de la TPS et de l'impôt sur le revenu des sociétés - la seule rentrée d'impôt qui ait augmenté depuis l'an dernier. Raison de plus, selon l'opposition, pour annuler la réduction d'impôts que les conservateurs veulent accorder aux grandes entreprises.

Compte tenu du déficit record enregistré cette année, la dette fédérale a augmenté de 55,4 milliards $, pour s'établir à 519,1 milliards $.

En matière d'emploi, le Canada a réussi à récupérer tous ceux perdus pendant la récession et près de 423 000 emplois ont été créés depuis juillet. Et le taux de chômage au pays est redescendu à 8,1%, après avoir atteint un sommet de 8,7%, ce qui le place aujourd'hui à 1,5 point de pourcentage en-deçà du taux affiché aux États-Unis.