L'industrie des cartes de paiement doit se plier à de nouvelles règles du jeu. Le ministre des Finances, Jim Flaherty, a annoncé hier l'entrée en vigueur d'un code de conduite volontaire destiné à l'industrie des cartes de crédit et de débit.

Ce code fait écho aux doléances des commerçants qui se plaignent depuis des années des frais qu'imposent VISA et MarterCard.

«C'est une belle journée!» s'est réjouie Martine Hébert, vice-présidente de la Fédération canadienne des entreprises indépendantes (FCEI) qui représente quelque 107 000 PME, dont 24 000 au Québec.

En effet, le code adopté par le fédéral est presque une copie conforme du projet que la FCEI avait déposé, a indiqué Mme Hébert. Mais la bataille a été ardue: «C'était David contre Goliath», dit-elle.

Les commerçants se sont rebiffés parce que les frais ont considérablement augmenté au cours des dernières années. Il faut savoir que le commerçant doit payer des frais chaque fois qu'un client règle un achat à l'aide d'une carte de paiement.

Ces frais peuvent atteindre jusqu'à 5% du total de la transaction, avec les cartes de crédit. Au Canada, les commerçants paient 4,5 milliards de dollars de frais annuellement, évalue la Coalition québécoise contre la hausse des frais de cartes de crédit et de débit.

Les transactions par carte de débit coûtent beaucoup moins cher aux commerçants. Par exemple, les membres de la FCEI paient des frais fixes de 5 cents, peu importe le total de la transaction.

Frais exorbitants

Le nouveau code de conduite ne s'attaque pas de front à l'augmentation des frais, déplore la Coalition. «Le code est une première étape. Il devra être complété par un encadrement afin de limiter les frais qui continuent d'être exorbitants», a dit Gaston Lafleur, président de la Coalition ainsi que du Conseil québécois du commerce de détail.

Le code assure quand même plus de transparence et de meilleures pratiques commerciales. Désormais, les réseaux de cartes de crédit devront fournir des relevés mensuels clairs et faciles à comprendre aux commerçants.

Ils doivent aussi avertir les commerçants 90 à 180 jours d'avance de toute modification à leur grille tarifaire. Et si les commerçants sont insatisfaits des changements, ils peuvent maintenant annuler leur contrat, sans pénalité.

Ottawa a mandaté l'Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC) pour veiller au respect du code.

Ce gain de dernière minute satisfait Option Consommateurs, qui avait présenté la demande au fédéral. «Vu la nature volontaire du code, on se posait beaucoup de questions... Heureusement, on a été entendus», a dit Geneviève Reid, responsable du service de recherche et de représentation d'Option Consommateurs.

Haro sur les cartes débit-crédit

Par ailleurs, le code de conduite freinera la progression de VISA et MasterCard dans le monde du débit, une percée qui inquiète les détaillants.

Les cartes qui combinent les fonctions de débit et de crédit sont carrément proscrites. Déjà monnaie courante ailleurs dans le monde, ces cartes mixtes commençaient à apparaître au Canada.

De plus, les émetteurs devront mettre la pédale douce sur les cartes privilèges. Ces cartes offrent des récompenses (voyages, cadeaux, remises, etc.) aux détenteurs. Mais elles coûtent plus cher de frais aux commerçants, qui avaient l'impression de payer pour permettre aux émetteurs de carte de crédit d'attirer des clients.

Désormais, les cartes privilèges seront accordées uniquement à des groupes précis, en fonction de leurs dépenses ou de leurs revenus, par exemple. Enfin, le code permet aux commerçants d'accorder des rabais à la caisse aux clients qui utilisent un mode de paiement plutôt qu'un autre. Ceux qui paient avec une carte de débit pourront payer moins cher que ceux qui utilisent leur carte de crédit.

«On n'a rien contre les rabais, mais on aurait aimé que la surfacturation en fonction du mode de paiement soit explicitement interdite dans le code», dit Mme Reid. Il arrive que certains commerçants exigent des frais supplémentaires aux clients qui paient à l'aide d'une carte de crédit, même si cela n'est pas permis.