Pour la première fois en dix jours, deux provinces canadiennes ont pu se financer sur le marché obligataire, hier.

La crise grecque, qui risquait de faire contagion jusqu'à dimanche, aurait forcé les provinces à consentir des taux trop élevés, compte tenu du contexte favorable qui prévalait jusqu'à la fin du mois dernier, surtout pour les échéances longues.

Opportunes, elles ont préféré que les choses se tassent quelque peu.

En une seule semaine, l'écart entre l'obligation du Québec venant à échéance en 2019 et l'obligation du Canada de même échéance s'était ainsi élargi de six points centésimaux. Le service d'une nouvelle dette émise la semaine dernière aurait augmenté d'autant.

«C'était la première semaine sans nouvelle émission d'une province depuis le début de l'année budgétaire», note Jean-François Godin, vice-président aux recherches chez Valeurs mobilières Desjardins. Il s'attend à une reprise graduelle des émissions, à mesure que les investisseurs sentiront le retour à une relative stabilité sur les marchés obligataires.

Le plan de secours de 1000 milliards de la zone euro a calmé les esprits, pour quelque temps du moins. À preuve, l'Ontario et la Colombie-Britannique ont facilement vendu hier matin des tranches de 600 et 495 millions venant à échéance dans 30 ans.

L'Ontario a consenti un taux de 4,77%, la Colombie-Britannique, 4,73%. Cet écart de quatre dixièmes est attribuable à la note de crédit légèrement supérieure de la province pacifique (AAA, contre AA-, selon Standard&Poor's et Aaa contre Aa1, selon Moody's).

Le début de juin est traditionnellement propice à de nouvelles émissions. Il correspond au paiement des coupons des obligations déjà émises.

Les provinces choisissent de se financer avant tout sur le marché canadien, ce qui leur évite le risque de change ou les frais pour s'en immuniser.

Cela dit, près de deux dollars sur cinq ont été empruntés à l'étranger l'an dernier. Plusieurs investisseurs jugent les obligations provinciales attrayantes, compte tenu de la stabilité économique et de la relative santé des finances publiques au Canada.

Les besoins d'emprunts nets des provinces s'élèvent à quelque 50,86 milliards pour l'année budgétaire 2010-2011, selon la compilation de M. Godin faite à partir des documents budgétaires. C'est une hausse de 5,3% sur les besoins nets de l'année précédente.

Pour l'année en cours, il s'agit de prévisions alors que les chiffres de l'an dernier sont réels. «Les provinces pourraient avoir des besoins moins grands puisque leurs budgets reposent sur des hypothèses de croissance économique très prudentes», note M. Godin.

Les gouvernements ne font pas qu'émettre de la dette nouvelle. Ils remettent aussi sur le marché celle qui est échue. Il y en aura pour 27,9 milliards cette année, soit un milliard de moins que l'an dernier.

Les besoins d'emprunts totaux s'élèvent donc à 78,8 milliards, soit 1,6 milliard de plus qu'en 2009-2010.

Si on ajoute aux émissions provinciales, celles d'Ottawa et de la Société canadienne d'hypothèques et de logement, les besoins financiers s'élèvent cette année à 213,8 milliards dont 128,6 représentent de nouvelles émissions. L'an dernier, les données étaient de 221,3 milliards, dont 145,1 milliards constituent de la nouvelle dette.