Après les dollars du pétrole, l'Alberta récoltera-t-elle aussi ceux de l'économie verte? C'est ce que croit le Conference Board du Canada, qui montre que la province est sur le point d'attirer plus d'investissements dans les technologies propres que toutes les autres provinces réunies.

L'Alberta est souvent perçue comme le mouton noir environnemental du Canada et ce n'est pas pour rien: elle émet environ trois fois plus de gaz à effet de serre que le Québec. Sauf que, d'ici quatre ans, elle raflera 6,1 des 11,8 milliards de dollars qui seront investis dans les technologies visant à combattre les changements climatiques, selon les prévisions du Conference Board.

 

«En général, on constate que les investissements importants se feront là où les besoins sont les plus importants», dit Len Coad, directeur des politiques sur l'environnement, l'énergie et la technologie au Conference Board.

Le chiffre de 6,1 milliards place l'Alberta loin devant l'Ontario (1,97 milliard), la Saskatchewan (1,3 milliard), le Québec (1,08 milliard) et la Colombie-Britannique (1,06 milliard) comme principale destination des investissements verts privés et publics d'ici 2014.

De ces dollars découleront des emplois. Le Conference Board croit qu'il s'en créera un peu moins de 120 000 d'ici quatre ans dans le secteur, dont près de 50 500 en Alberta. Le Québec peut espérer en récolter 12 300, et l'Ontario, 29 000.

Ces chiffres peuvent paraître ironiques étant donné que les cibles de réduction de l'Alberta sont loin d'être parmi les plus ambitieuses au pays. En fait, avec un objectif de réduction de 20% de ses émissions de gaz à effet de serre d'ici 2020 par rapport au niveau de 1990, c'est le Québec qui possède le plan de réduction le plus «agressif» au pays pour 2020, selon M. Coad.

Les chiffres du Conference Board ont néanmoins une certaine logique. Parce que, si l'Alberta attirera le gros des investissements canadiens, c'est en partie parce qu'il en coûtera beaucoup plus cher de réduire les émissions là-bas... qu'au Québec.

Le Conference Board montre en effet que les émissions québécoises proviennent en grande partie de ses voitures et ses camions, tandis que, en Alberta, elles sont générées par l'extraction des sables bitumineux et la production d'électricité à partir de charbon.

«En Alberta, les réductions vont largement passer par des technologies qui ne sont pas encore commercialisées ou qui n'existent carrément pas encore, souligne M. Coad, qui pointe du côté des techniques de capture et de séquestration de carbone. Cela demande des niveaux d'investissements plus élevés.»

Un potentiel d'exportation?

Le Conference Board affirme que le Canada pourrait générer beaucoup plus que les 116 000 emplois prévus s'il parvient à exporter ses technologies.

«Ou bien le Canada deviendra un leader dans le développement et la commercialisation des technologies climatiques, ou bien nous compterons sur les autres pour nous les vendre», écrit l'organisme, qui estime qu'il est trop tôt pour dire quelle direction prendra le pays.

Autre fait intéressant: chaque dollar investi dans les technologies propres produira plus d'impact sur le produit intérieur brut (PIB) et créera plus d'emplois en Ontario qu'au Québec, en Alberta ou en Colombie-Britannique. Pourquoi? Parce que l'Ontario possède les fournisseurs qui pourront soutenir cette industrie, tandis que les autres provinces devront faire appel à l'extérieur pour alimenter leurs industries vertes.

Ainsi, investir 100 millions dans les technologies vertes en Ontario générera 107 millions de PIB, comparativement à seulement 75 millions au Québec et à 79 millions en Alberta. La même somme créera 1461 emplois en Ontario, comparativement à 1094 au Québec et seulement 736 en Alberta.

 

INVESTISSEMENTS EN TECHNOLOGIES CLIMATIQUES ENTRE 2010 ET 2014 (en milliards de dollars )

ALBERTA 6,10

ONTARIO 1,97

SASKATCHEWAN 1,32

QUÉBEC 1,08

COLOMBIE-BRITANNIQUE 1,06

source: the conference Board of canada