La récession qui a sévi de l'automne 2008 jusqu'à la fin du printemps dernier aura durement mis à l'épreuve les détenteurs de dettes des sociétés canadiennes.

Vingt-huit émissions de prêts ou d'obligations n'ont pas donné les fruits promis par les emprunteurs, selon un rapport de l'agence de notation Moody's publié hier. «Les défaillances se sont accélérées dramatiquement durant 2008-2009», observe Sharon Ou, analyste de la firme établie à New York.

Les 16 cas observés en 2009 constituent un record annuel depuis 1989, qui éclipse les 12 défaillances de... 2008. À hauteur de 22,46 milliards, la valeur des émissions en incapacité de ces deux années est moins élevée cependant que les 24,2 milliards perdus par les investisseurs dans la foulée de l'éclatement de la technobulle, en 2001 et 2002. À l'époque, les faillites d'AT&T Canada et de Teleglobe, deux sociétés dont la note de crédit était de qualité investissements, avaient créé une jolie commotion.

Cette fois-ci, les émetteurs dans le secteur des télécommunications ont fait encore sourciller les investisseurs, mais moins que la dette émise par le segment de la foresterie.

La faillite de Nortel a privé les détenteurs de sa dette canadienne d'un peu plus de 5 milliards. Ironiquement, cette défaillance aurait peut-être dû être rattachée à la technobulle, puisqu'une comptabilité créative, voire du maquillage de bilan, a servi de tente d'oxygène à l'entreprise pendant plusieurs années.

Durant la dernière récession, c'est avant tout les émissions de plus 5,1 milliards d'AbitibiBowater et d'Abitibi-Consol qui ont perturbé le bilan des obligations de société.

La mégaentreprise n'était pas la seule du segment forestier en difficulté. Moody's répertorie aussi Ainsworth Lumber, Papiers Fraser, Grant Forest Products. Mercer International, Smurfit Stone Container et Tembec.

Fait à signaler, une seule entreprise du secteur financier figure parmi les cancres. Il s'agit de... General Motors Acceptance Corp. of Canada.

«À la différence des États-Unis où les défaillances étaient concentrées dans le secteur financier en 2008 et dans le non financier en 2009, celles au Canada étaient surtout dans le non financier les deux années», observe Mme Ou.

De 1989 à 2009, près de la moitié des 101 défaillances observées ont été des émissions venant de la foresterie et des mines et métaux. Exprimées en valeur cependant, les défaillances dans le secteur des télécommunications le placent bon premier avec 41% des emprunts non honorés.

Signe des temps, le ratio notes de crédit bonifiées/décotées est passé de 0,6 en 2007 à 0,2 seulement en 2008 et 2009. Avant 2008, la moyenne historique était de 0,8.

«Le modèle de prévisions de Moody's projette que le taux de défaillance des obligations canadiennes corporatives de qualité spéculative (junk bonds) devrait diminuer substantiellement au cours des 12 prochains mois», précise Mme Ou.

De 1989 à 2009, le taux moyen de défaillance des émissions canadiennes, toutes notes de crédit confondues, s'établit à 8,4%, après cinq ans, comparativement à 10,1% aux États-Unis.

Le taux dans la catégorie spéculative s'élève cependant 23,5% et 23,6%, respectivement.