Les dirigeants d'entreprise qui demandent l'aide de l'État canadien pour traverser la crise actuelle ne pourraient toucher plus de 500 000$ par année, selon un projet de loi déposé hier au Sénat par Céline Hervieux-Payette. Et leurs primes diverses ne pourraient dépasser le tiers de leur rémunération.

Ces deux mesures s'appliqueraient aux cinq dirigeants les mieux rémunérés pour les entreprises qui obtiennent une aide de moins de 250 millions de dollars et jusqu'aux 20 plus hauts salariés pour les sociétés à qui Ottawa verse une aide d'un milliard et plus.

Sa définition d'aide financière est large. «Ça va être autant de prendre des actions, des prêts garantis, sous forme de débenture ou autres. Toutes les formes d'argent», explique-t-elle en entrevue.

D'autres articles de son projet de loi touchent aussi les actionnaires, qui n'auraient droit à aucun dividende tant que l'entreprise aidée n'aurait pas fini de rembourser l'État.

Entreprises en Bourse

S'inspirant de la grogne des actionnaires de sociétés inscrites en Bourse, qui en ont contre les salaires versés aux dirigeants, la sénatrice libérale écrit dans son projet que la rémunération des dirigeants d'entreprise «ne peut être supérieure à 20 fois le salaire industriel moyen par année au Canada, calculé par Statistique Canada». Cela équivaut à environ 800 000$ par an.

Cette mesure s'appliquerait à toutes les sociétés en Bourse, qu'elles reçoivent ou non de l'aide de l'État.

La sénatrice veut aussi que les entreprises rendent publics tous les avantages consentis aux dirigeants, de la formation professionnelle aux voitures de fonction.

«Les colloques à Hawaï, les conférences à Dubaï, puis les séminaires à Paris... entre vous et moi, les compagnies canadiennes, si elles veulent en faire, elles peuvent en faire à Montréal.»

Les administrateurs de société ne pourraient pas siéger à plus de quatre conseils d'administration. Et interdit de leur verser des options.

Pour illustrer le malaise qu'elle perçoit au sein des conseils d'administration, elle utilise l'exemple d'AbitibiBowater, où le conseil d'administration a octroyé 17,5 millions à son président sortant, John Weaver, alors que les avertissements de crise de liquidités se multipliaient.

«Ben voyons donc! Les administrateurs, sur quelle planète ils vivent ces gens-là? C'est pour ça que j'ai mis les administrateurs, pas juste les dirigeants. C'est une relation un peu incestueuse en ce qui me concerne», dit Céline Hervieux-Payette.

Disant s'inspirer de mesures adoptées ailleurs, la sénatrice promet de revenir à la charge avec pas moins de cinq autres projets de loi sur la gouvernance et le système financier au cours des prochains mois.

Mais déjà hier, son chef, Michael Ignatieff, s'est montré réticent, disant que «le gouvernement du Canada n'a pas de rôle valable en légiférant dans ce domaine-là».